dimanche 10 décembre 2017

Héros populaire

La France médiatique vit au rythme de deux disparitions "mythiques", celle de D'Ormesson et celle de Hallyday, l'intellectuel aristocrate et l'artiste saltimbanque : deux facettes de notre pays paradoxal. Je me lance dans cet exercice car j'ai suivi par curiosité les deux cérémonies, très différentes mais uniques chacune dans leur genre. Pour l'un, les Invalides avec les honneurs de la nation, pour l'autre, un départ rock'n'roll avec des bikers sur leur Harley Davidson de prestige.  Une marée humaine a déferlé à Paris ce samedi, toutes générations confondues, surtout venues d'une France profonde et périphérique. Cette foule de fans semblait éprouver pour ce chanteur populaire une véritable adoration. Le rock'n'roll, le blues, la pop irriguent la culture musicale d'une très grande majorité de Français. J'avoue que j'ai rarement écouté Johnny car mes goûts musicaux sont depuis toujours du côté du classique... Pourtant, je me souviens des débuts du "yé-yé" quand mes parents tenaient un bar.  Un jour, un scopitone a fait son apparition dans l'établissement. L'ambiance a changé d'un seul coup : les jeunes du village sont venus fréquenter le bar pour écouter cette musique de "sauvages"... Les stars modernes sont nées à ce moment-là : Richard Anthony, Eddy Mitchell, les Chaussettes noires, et surtout Johnny, le plus grand de tous. Le twist faisait des ravages et qui, dans ma génération, n'a pas dansé sur ces airs-là ? Quand je m'imagine cette époque des années 60, les années de mon adolescence, nos oreilles étaient collées sur le transistor pour écouter Salut les Copains... Des clans naissaient dans le lycée : celui de Johnny, celui d'Adamo, celui de Claude François. Ces années d'une France qui entrait dans une modernité musicale, sociétale, culturelle restent gravées dans la mémoire des Français(e)s ! Tous ces fans qui ont défilé sur leur moto veulent faire durer leur jeunesse dans une impossible quête de rêve américain. Car Johnny ressemblait à ses fans : simple et complexe à la fois. Il symbolisait la force vitale, la liberté dans ses excès : l'alcool, la coke, la vitesse, les  femmes et les copains... Et sa voix chaude chantait tous les malheurs d'amour, consolait les inconsolables et donnait un moral d'acier à tous les éclopés de la vie. Johnny, le rocker thérapeute, le demi-dieu du public est parti dans une apothéose kitsch...