lundi 12 septembre 2011

Pascal Quignard

L'oeuvre de Pascal Quignard me fascine depuis trente ans... Du "Salon de Wurtemberg" (1986) à la "Villa Amalia" (2006), des "Tablettes de buis d'Apronenia Avitia" à la "Terrasse sur Rome", "La vie secrète", "Le lecteur", "La haine de la musique", et sa cathédrale de mots "Le Dernier Royaume", dont je viens de finir le tome 6 : "La barque silencieuse" après avoir lu attentivement dans l'ordre chronologique : "Les ombres errantes" tome 1, "Sur le jadis" tome 2, "Abîmes" tome 3, "Les paradisiaques" tome 4, "Sordissimes" tome 5. Les livres de Quignard commencent à occuper un bon mètre linéaire dans ma bibliothèque. Il est temps d'éditer Quignard en Pléïade pour que je libère quelques places et que j'emporte la nouvelle édition en voyage... Cette fascination que j'éprouve pour lui est très difficilement explicable. Beaucoup d'essais sont consacrés à son oeuvre, reconnue évidemment par la critique universitaire. Je le lis en "amateur" sans me poser mille questions sur ces textes parfois obscurs, souvent hermétiques mais cette expérience littéraire unique en France mérite tous les efforts du lecteur motivé. Les premières lignes de la "Barque silencieuse" sont un concentré de l'art d'écrire de Pascal Quignard : "j'aurai passé ma vie à chercher des mots qui me faisaient défaut. Qu'est-ce qu'un littéraire ? Celui pour qui les mots défaillent, bondissent, fuient, perdent sens. Ils tremblent toujours un peu sous la forme étrange qu'ils finissent pourtant par habiter. Ils ne disent ni ne cachent : ils font signe sans repos." La lecture devient un plaisir gourmand car je savoure cette prose lumineuse d'intelligence, de culture, d'érudition stupéfiante sur le monde antique, les mythes, les légendes, les temps anciens. Il conte des anecdotes historiques sur des personnages réels ou imaginaires. Il intègre des phrases magnifiques sur la vie, la mort, la naissance, le temps, la solitude. Ces fragments de philosophie ponctuent les récits. Et, je "tombe" sur une page consacré à la lecture, à l'acte de lire que je vous cite : "Les livres peuvent être dangereux mais c'est la lecture surtout, par elle-même, qui présente tous les dangers. Lire est une expérience qui transforme de fond en comble ceux qui vouent leur âme à la lecture. Il faut serrer les vrais livres dans un coin car toujours les vrais livres sont contraires aux moeurs collectives. Celui qui lit vit seul dans son "autre monde", dans son "coin", dans l'angle de son mur.(...) Dans la littérature, quelque chose résonne de l'autre monde. Quelque chose se transmet du secret." La lectrice que je suis ne peut qu'adhérer à ces réflexions si évidentes... Je lis, je re-lis, je conserve les livres de Pascal Quignard comme des trésors qui représentent la quintessence de la littérature française, complétement décalée, hors de l'histoire contemporaine... Une oeuvre solitaire, une oeuvre de solitaire. La presse littéraire nous annonce la sortie d'un nouveau Quignard, je serai en librairie ce jour-là...