mardi 25 mai 2021

Escapade basque, 4

 Pour savourer la beauté de Biarritz, il faut se lever tôt et se retrouver près de l'Eglise Sainte-Eugénie vers 9H du matin. Il n'y a littéralement personne ou peu de quidams qui arpentent les rues pentues qui bordent l'océan. J'ai mon parcours préféré dans cette ville impériale : grimper sur le rocher Le Basta, situé à l'extrémité du port des pêcheurs. Couvert de tamaris et accessible par un pont en pierre, je peux admirer le panorama sur la Grande Plage et le Cap Saint-Martin où se dresse le phare de la ville, construit en 1834. Je traverse ensuite le port des pêcheurs où quelques maisonnettes appelées crampottes ont gardé leur charme d'antan. La particularité du site biarrot se voit dans ses rochers massifs aux noms évocateurs, posés sur le rivage : La Frégate, l'Atalaye, Le Boucalot et le célèbre Rocher de la Vierge. Je monte des escaliers entre les hortensias et les tamaris et je parviens au musée de la mer, une institution indispensable de la vie marine. Une passerelle d'acier, construite par Gustave Eiffel à la fin du XIXe, joint le Rocher de la Vierge à la terre ferme. Ce lieu éminemment touristique attire la foule sauf pendant la matinée. J'ai croisé le vrai visage de Biarritz avec les pêcheurs, les travailleurs, les baigneurs et les randonneurs urbains comme moi (et mon frère). Le club local des Ours blancs prône la baignade quotidienne pour une santé de fer ! Je les vois s'éloigner avec un courage incroyable, de la plage de la Côte des Basques pour atteindre le rocher Le Boucalot malgré la houle, malgré le froid, malgré la pluie ! Ensuite, je passe par les rues du centre-ville, la place Sainte-Eugénie et la Place Clémenceau. Je m'arrête pour acheter un livre dans une des meilleures librairies de notre pays, le Bookstore. J'ai croisé ce jour-là un client masqué, Frédéric Schiffter, un philosophe élégant, vivant à Biarritz depuis longtemps. J'avais lu quelques ouvrages de lui où il dénonce le "chichi et le blabla" des philosophes qui se prennent trop au sérieux. Il appartient à la catégorie des sceptiques joyeux et pessimistes comme son aîné, Clément Rosset. J'aime cette librairie toute en bois noir avec son premier étage en forme de salon où les livres s'étalent sur les rembardes de l'escalier. Les livres de poche sont disposés dans un sous-sol exigu et cette librairie labyrinthe n'a pas changé son décor depuis plus de quarante ans. Une halte culturelle dans ma balade océanique. Je redescends sur la Grande Plage sans oublier de regarder les vitrines des pâtisseries-chocolateries patrimoniales comme Adam et ses macarons uniques et Miremont. Arrivée sur la Grande Plage, l'atmosphère devient impériale avec la présence du Grand Palais jouxtant la plage. Napoléon III et l'impératrice Eugénie font de Biarritz un lieu de villégiature et grâce à eux, tout le gotha de la société européenne fréquente la station balnéaire. Depuis cette époque, la ville a gardé son charme basque des années 20 où de nombreux artistes comme Picasso appréciaient cet air marin fortement iodé. Depuis quelques années, les médias parlent trop de Biarritz qui est devenue une ville victime de son succès. Le matin, c'est le seul moment où je goûte avec bonheur le charme de la cité basque qui mêle ses pierres urbaines aux rochers battus par les vagues du Golfe de Gascogne. Une balade revigorante avec la vue et la musique océaniques, les terrasses pleines en ce jour de mai,  un esprit de légèreté très agréable à vivre après la période du confinement !