mercredi 29 mai 2019

Rubrique cinéma

Je ne peux pas résister à un Almodovar, le cinéaste espagnol qui ne me laisse jamais indifférente. J'ai donc vu "Douleur et Gloire", son dernier film, sélectionné au Festival de Cannes. Antonio Banderas, l'alter ego de Pedro Almodovar a tout de même obtenu le prix du meilleur interprète masculin. Le Festival a encore boudé ce film et j'ai regretté leur choix final. Salvador, le double du cinéaste, perd l'inspiration pour tourner un nouveau film. Diminué par des douleurs physiques récurrentes, il commence à souffrir d'une dépression existentielle. Il se sent vide, errant dans son bel appartement madrilène. Il est invité à une rétrospective de ses œuvres à la Cinémathèque et doit recontacter un de ses acteurs. Celui-ci est devenu accro à la drogue. Le film se déroule sur deux plans : le présent de Salvador à la recherche d'un projet et son passé peut-être réinventé. Les images défilent sur sa mère travailleuse, interprétée par la pétillante Pénélope Cruz dans une Espagne des années 60 où on la voit laver son linge au lavoir. Cette enfance pauvre entre un père courageux et une mère aimante a forgé la sensibilité de Salvador. Cette mère traverse le film à tous les âges et Salvador l'accompagne jusqu'à sa mort où elle lui susurre à l'oreille : "Tu n'as pas été un bon fils"... Des scènes d'anthologie deviennent des clés pour comprendre la personnalité de Salvador-Pédro : la découverte de son attirance pour les hommes quand il est adolescent devant un ouvrier artiste qui se dénude pour se laver. Le décor inouï de la caverne familiale, aménagée en logement renforce la magie de la scène. Cette découverte rejoint ses retrouvailles avec son ex-compagnon, perdu de vue depuis trente ans. Il accueille son ancien amant chez lui qui lui révèle son choix de vie avec les femmes. Il a même deux fils. Ils ont pourtant conservé leur amour mutuel même sans partager une vie commune. Leur baiser d'adieu d'une sobriété émouvante ferme un cycle dans la vie du cinéaste. Le voilà prêt à rebondir dans son art, le cinéma, son véritable moteur de vie. Humour et sérieux, gravité et légèreté, Pedro Almodovar a peut-être perdu sa vitalité débridée de ses premiers films mais pour ma part, je préfère le temps de la maturité, d'une intimité complice. Un grand Almodovar avec des thèmes récurrents : un hymne à sa mère, son homosexualité assumée, la passion du cinéma. Ce film autobiographique testamentaire, émouvant et captivant, est encore à l'affiche. Ce serait dommage de s'en priver… 

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