jeudi 13 juin 2013

"Chronique d'hiver"

Dès qu'un "Paul Auster" sort en librairie, je n'attends pas des mois pour le découvrir. Je me précipite pour le lire et je ne suis jamais déçue ou presque jamais déçue... Cette "Chronique d'hiver" prend la forme d'un journal intime, écrit à la deuxième personne du singulier. Ce tutoiement pourrait déranger le lecteur(trice) mais dès la première ligne, on écoute cette voix singulière avec une attention permanente : "Tu crois que ça ne t'arrivera jamais, que ça ne peut pas t'arriver, que tu es la seule personne au monde à qui aucune de ces choses n'arrivera jamais, et pourtant, l'une après l'autre, elles se mettent toutes à t'arriver, exactement comme à tout le monde". Paul Auster s'adresse donc à lui-même, en priorité mais il nous tend un miroir. Avec sa soixantaine bien assumée, l'écrivain établit un bilan de sa vie à partir de son corps dans sa multitude de sensations physiques, sensations révélatrices de sa personnalité.  Ce livre-puzzle, où les souvenirs affluent sans ordre chronologique, aborde un sujet central : la mémoire. Que retenons-nous du passé ? Quels sont les événements décisifs ? Son corps joue un rôle majeur dans cette exploration vertigineuse de son enfance jusqu' à sa soixantaine. Dans un article paru dans le Magazine littéraire de juin, Paul Auster évoque la prise de conscience de sa "vulnérabilité" : "Pour dire la vérité, j'ai voulu faire partager le sentiment d'être en vie. De vivre dans un corps et dans un esprit". Il a composé un texte contre l'oubli, l'oubli de soi et des autres, des lieux, des sentiments, des émotions, un magnifique patchwork de mots qui tentent l'impossible : comment écrire l'émerveillement de vivre ? Paul Auster répond ainsi au journaliste : "Quel est le rôle de l'écriture ? je n'ai pas de réponse satisfaisante. Ce que nous faisons, en tant qu'écrivains, est presque inutile. Peu de gens lisent, se soucient de littérature.  J'ai parfois le vif sentiment qu'écrire est une manière ridicule de passer sa vie. (...) Je sais que j'ai mis toutes mes forces à dire la vérité sur la page". Un livre majeur à lire absolument...

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