J'ai écouté une émission de France Culture sur les 40 ans de "Répliques", une véritable institution du service public. Guillaume Erner a reçu Alain Finkielkraut dans les "Invités du matin", disponible en podcast. Evidemment, je ne rate jamais un "Répliques" tellement les sujets abordés sont très souvent passionnants. Depuis tant d'années, cet exercice intellectuel de l'académicien honore France Culture. Le philosophe raconte qu'il voulait "faire une place à la conversation civique" et renouer avec "l'idéal démocratique" en rappelant la citation d'Albert Camus : "Le démocrate est modeste. Il sait qu'il ne sait pas tout. Il a besoin des autres pour savoir ce qu'ils savent". Ce besoin de dialoguer, ce souci permanent de comprendre, de décrypter les idées sur le monde demeurent l'obsession du philosophe. Il cite une amie de Tocqueville qui s'exclamait : "A quoi servirait de vivre si l'on n'entendait que le son de sa propre voix ?". Dans le panorama de la vie intellectuelle française, cette émission est restée une vigie éclairante, prônant la tolérance et le non sectarisme. Alain Finkielkraut, homme de gauche, est décreté "réactionnaire" par ses anciens amis et collègues. Cette logique de dénonciation rend "difficile la conversation dans le monde intellectuel". Malgré des attaques récurrentes contre son esprit de liberté et de vérité du réel, le philosophe trace son sillon et régale ses auditeurs. Comme la littérature me passionne, j'écoute avec intérêt les émissions sur les écrivains : Proust, Anatole France, Péguy, Colette, Cioran et tant d'autres. Il invite des philosophes, des sociologues, des artistes en traitant de sujets contemporains souvent clivants comme l'aide active à mourir, la nouvelle paternité, les luttes féministes, la justice, etc. On ne s'ennuie jamais avec lui et avec ses interlocuteurs. J'apprécie aussi son amour total pour la littérature qu'il vénère : "Il faut, à 14 ou 15 ans, s'ouvrir à des livres trop grands pour soi, pour connaître la volupté de comprendre sans comprendre". Il faut lire en particulier "Le Coeur intelligent" où l'écrivain-philosophe évoque neuf romans essentiels à lire dans sa vie. Encore aujourd'hui, j'ai suivi son émission sur "Trump, chaos ou stratère incarné", un débat passionnant sur l'actualité du moment concernant la géopolitique. Et tout ce j'ai écouté n'est pas vraiment réjouissant. Alain Finkielkraut, aidé par son équipe, me surprend toujours, tellement il m'aide à mieux comprendre le monde. C''est le rôle d'une radio comme France Culture. 40 ans de réflexions, 40 ans de débats, 40 ans de points de vue, je souhaite qu'il poursuive son chemin 40 ans de plus ! Et je serai fidèle au rendez-vous de "Répliques".
des critiques de livres, des romans, des moments de lectures, des idées de lecture, lecture-partage, lecture-rencontre, lectures
lundi 6 octobre 2025
samedi 4 octobre 2025
Atelier Littérature, 4
Agnès a choisi comme coup de coeur, le roman de Viola Ardone, "Les Merveilles", publié en 2024 ehez Albin Michel. En 1982, Elba, quinze ans, est née dans l'asile où sa mère a été abusivement internée. Elle a suivi des études chez les religieuses et revient dans l'hôpital pour se rapprocher de sa mère. Le jeune fille décrit ce monde de malades mentaux mal soignés et même négligés par les soignants. Seuls comptent les cachets, les sangles, les électro chocs. Ce milieu impitoyable va commencer à changer quand un jeune psychiatre prône l'écoute et surtout la libération des malades. Il prend aussi Elba sous son aile bienveillante et découvre "le poids et la force de la paternité". Agnès a aussi apprécié le dernier récit de Gaëlle Josse, "De nos blessures, un royaume". Pascale a présenté "La Sentence" de Louise Erdrich, paru en Livre de Poche en 2025. Tooke, une quadragénaire d'origine améridienne, ayant fait quelques années de prison, est embauchée dans une libraire de Minneapolis. Lectrice assidue, elle aime beaucoup son travail mais, l'esprit d'une cliente récemment décédée vient hanter les rayonnages de la librairie. La ville est à feu et à sang après la mort de George Floyd et le monde s'est figé avec l'arrivée du covid. Que va devenir Tokee dans ce monde devenu fou ? Il faut lire ce roman pour connaître le destin de cette femme courage. "Une lecture réjouissante", s'est exclamée Pascale. Odile Ba a évoqué son deuxième coup de coeur avec le dernier roman de Natacha Appanah, "La nuit au coeur", paru chez Gallimard. L'écrivaine entrelace trois histoires de trois femmes, victimes de la violence de leur compagnon. Ces féminicides dans le cadre conjugal, un sujet terrible et malheureusement récurrent à la fois. Une nouveauté de la rentrée littéraire à découvrir. Annette a beaucoup apprécié cet été une biographie romancée, "Artemisia" d'Alexandre Lapierre. En 1611, à Rome, la jeune Artemisia se bat avec fureur pour peindre. Son père, Orazio Gentileschi, veut cacher le génie de sa fille. Mais, son destin d'immense artiste va s'imposer. Une biographie exemplaire, documentée et très agréable à lire. Et comble du bonheur, l'Italie de la Renaissance en prime : Voilà pour tous les excellents coups de coeur du premier atelier de la nouvelle saison. Nous nous retrouverons le jeudi 16 octobre dans le même lieu, "Jetez l'encre" autour d'Emmanuel Carrère.
vendredi 3 octobre 2025
Atelier Littérature, 3
Une nouvelle lectrice, Marie-Christine, a rejoint l'Atelier ce jeudi. Elle a choisi comme premier coup de coeur un roman d'Antonio Skarmeta, "Une ardente patience", paru en 1987 au Seuil. Un facteur, Mario Jiménez, porte le courrier à un poète illustre, Pablo Neruda, dans l'île Noire, en Argentine. Mario demande au poète de l'aider à conquérir la fille de l'aubergiste qu'il aime en lui envoyant des poèmes. Une amitié naît entre les deux hommes mais, la tragédie surgit avec la mort du poète, celle d'Allende et la fin de la démocratie chilienne. Un roman attachant et sensible. Marie-Christine a cité un deuxième coup de coeur, "Oublier Klara", d'Isabelle Autissier. paru en livre de poche en 2020. Ce roman se passe à Mourmansk, au nord du cercle polaire où Rubin, sur son lit d'hôpital, se souvient de sa mère, chercheuse scientifique, arrêtée par la police stalinienne. Le fils de cet homme a choisi l'exil en Amérique pour oublier le passé familial. Il revient vers son père, vingt-trois ans après pour mener son enquête sur ce passé douloureux. Un roman à découvrir. Geneviève a beaucoup apprécie les deux tomes de l'autobiographie de Doris Lessing, "Dans ma peau" et "La marche dans l'ombre". Prix Nobel de littérature en 2007, cette écrivaine anglaise, née en Iran, a passé son enfance et sa jeunesse en Rhodésie. Son oeuvre "polyforme" se compose de romans, d'écrits autobiographiques, de science-fiction, de nouvelles. Elle s'inspirait de son expérience africaine, de ses engagements sociaux et politiques. Une immense écrivaine à découvrir ou à redécouvrir avant que les générations actuelles et futures ne l'oublient. Geneviève a aussi évoqué en deuxième coup de coeur, "Giovanni Falcone" de Roberto Saviano. Le 23 mai 1992, à Palerme, la mafia assassine le juge Falcone, un homme exemplaire qui, vingt ans plus tôt, a ouvert le dossier antimafia. Il sait que la mafia va le tuer mais il ne désarme pas devant la peur. Il faut lire ce récit documenté et impressionnant d'un auteur italien qui connaît très bien ce sujet.
jeudi 2 octobre 2025
Atelier Littérature, 2
Véronique a présenté le roman de Leonor de Recondo, "Marcher dans tes pas", publié chez Iconoclaste. La narratrice raconte la vie d'Enriqueta, sa grand-mère qui a fui l'Espagne franquiste en 1936 en perdant tout. Quarante ans plus tard, Leonor de Recondo, rend un hommage émouvant à cette femme et demande la bi-nationalité franco-espagnole pour reconnaître sa double identité. La narratrice veut réparer l'oubli des victimes du franquisme dans la guerre civile. Sa grand-mère était une femme libre, courageuse et combattive. Face à ce passé familial douloureux, Leonor de Recondo tisse un lien indéféctible avec Enriqueta. Il ne faut jamais oublier toutes ces victimes et ce devoir de mémoire rappelle les tragédies de cette guerre horrible : "Le devoir de mémoire ne doit-il pas d'abord rendre hommage aux victimes ? Comme il n'y eut aucun procès après la mort de Franco, et qu'un silence a été accepté par tous, les fosses sont restées fermées et les noms des perdants se sont effacés à jamais. Enfants et petits-enfants, souvenons-nous. La mémoire se travaille, elle n'est pas acquise, elle se cultive". Une nouveauté de la rentrée à découvrir. Odile Bo a évoqué un roman de Philippe Manevy, "La colline qui travaille", publié chez l'éditeur, Le Bruit dans le monde. L'auteur raconte son roman familial sur quatre générations en commençant par sa grand-mère, Alice, tisseuse de métier et figure de proue d'un mouvement ouvrier après la victoire du Front Populaire. Son mari, typographe, s'est aussi engagé dans la Résistance. Ils auront une fille, Martine. Chaque chapitre met en lumière un membre de la famille qui traverse les deux guerres mondiales, les Trente Glorieuses et la fin du XXe. Une saga familiale comme on les aime. Odile a aussi choisi en deuxième coup de coeur, "Du même bois" de Marion Fayolle, paru en Folio. Dans une ferme, l'histoire d'une famille et leur mode de vie de génération en génération. L'omniprésence des bêtes dans leur environnement envahit leur espace. Par petites touches sur le vif, ce premier roman avait été salué par les critiques littéraires. (La suite, demain)
mercredi 1 octobre 2025
Atelier Littérature, 1
Après quelques mois d'interruption estivale, l'Atelier Littérature a fait sa rentrée le jeudi 25 septembre dans un nouveau lieu, "Jetez l'encre", un bar-salon confortable, en face de la Médiathèque. Nous étions une bonne dizaine autour de la table et j'étais, évidemment, ravie de retrouver mes amies lectrices. Je n'avais donné qu'une consigne pour ces retrouvailles : évoquer les coups de coeur de l'été. J'ai présenté avant de démarrer la séance le programme de la nouvelle saison avec trois rendez-vous prévus d'octobre à décembre. Le jeudi 16 octobre, nous invitons virtuellement Emmanuel Carrère, un écrivain français incontournable à l'occasion de la sortie de son nouveau livre : "Kolkhose". En novembre, j'ai choisi une écrivaine anglaise "romantique et intemporelle" dont on fête les 250 ans de sa naissance en 1775 ! En décembre, je proposerai une liste de romans d'amour. Odile Ba a lancé la séance des coups de coeur avec la trilogie de Leila Slimani : "Le Pays des autres", "Regardez-nous danser" et "J'emporterai le feu". Odile aime beaucoup cette saga familiale où la situation des femmes l'intéresse au plus haut point, ces femmes qui cherchent à "se libérer, chacune à sa façon, dans l'exil ou dans la solitude". Mylène nous a présenté un roman original, "Division Avenue" de l'écrivaine américaine Goldie Goldbloom, publié en 2021 chez Bourgois. Cette Division Avenue se situe à New York, dans le quartier juif orthodoxe de Brooklyn. Surie Eckstein, mère de dix enfants, découvre qu'elle est enceinte à 58 ans ! Quel événement singulier et extraordinaire ! Elle décide de taire cette grossesse, ment à sa famille et à ses amis. Elle détient un secret concernant un de ses fils, Lipa. L'écrivaine brosse le portrait empathique, tendre et émouvant d'une femme discrète par excellence dans le milieu de la communauté juive hassidique, rythmée par de nombreuses fêtes religieuses, par des rites et des interdits. Il faut lire ce beau roman pour découvrir le secret de Surie. Le deuxième coup de coeur de Mylène concernait les romans d'Anne Tyler, en particulier "La danse du temps" et "Une autre femme". Mylène a eu une très bonne idée de parler de cette écrivaine américaine qui mériterait d'être mieux connue. Tous ses romans évoquent la famille, le couple, les enfants, l'émancipation des femmes toute en douceur et l'humour distancié. (La suite, demain)