Dès que j'ai appris la date de sortie d'un dernier Quignard, je suis allée l'acheter chez Garin. "Fan" de cet écrivain quelque peu énigmatique, je le lis et le relis régulièrement. Son roman, "Trésor caché" semble rencontrer un succès auprès d'un public élargi car l'écrivain pourtant farouche à toutes promotions est passé à la Grande Librairie, mais aussi à France inter et France culture. Je le soupçonne aujourd'hui de son envie de quitter sa caverne au bord de sa rivière pour que son oeuvre soit plus visibilisée dans les médias. Les critiques se montrent unanimes sur la qualité de son dernier livre, d'une clarté inhabituelle. L'écrivain n'hésite plus à révèler qu'il a vécu des périodes dépressives dans sa vie et il parvient maintenant à surmonter ses crises. Il préfère comme tout un chacun cultiver le bonheur, choisir la joie à la tristesse. Pascal Quignard raconte donc sa foi retrouvée pour une vie "bonne et belle". J'ai toujours apprécié son indépendance revendiquée et sa liberté d'écriture. Il me fait penser à son illustre collègue, Julien Gracq, d'une discrétion absolue et refusant même le prix Goncourt pour ne pas se compromettre avec le spectacle médiatique que cela implique. Que raconte-t-il dans sa nouvelle fiction ? Son personnage central se nomme Louise, une quinquagénaire, lectrice de manuscrits et vivant dans une maison de campagne avec son chat. Un jour, son chat meurt et elle décide de l'enterrer dans son jardin. En creusant la terre, elle découvre une cassette pleine de pièces d'or et de bijoux, "le trésor caché". Le conte démarre sur cet événement proche de l'enfance. Qui n'a pas rêvé de découvrir un trésor dans son jardin ? Ce cadeau inopiné va lui offrir une vie nouvelle. Elle aime voyager et parcourt le monde mais elle tombe amoureuse de la baie de Naples. Elle rencontre Ludwig ou Luigi, un allemand amoureux de Procida. Louise connaît l'amour avec un grand A, d'un romantisme sensuel flamboyant : "Le bonheur s'avança comme une vague brusque et immense qui, peu à peu, la renversa et l'engloutit". Cette parenthèse enchantée quoique très brève va se refermer quand Luigi perd sa mère adorée à Ischia. Après le deuil d'une mére, un autre événement bouleverse le couple. Ischia, cette île volcanique, étrange et fascinante, va subir un tremblement de terre qui ravage l'île, symbole du couple Louise-Luigi. Pascal Quignard, en moraliste très XVIIe siècle, intègre souvent dans son texte des aphorismes comme celui-ci : "Il est possible que l'amour soit une tendresse pour la solitude de l'autre". Son compagnon plonge alors dans une grande tristesse et il ne s'en remet pas : "Le chagrin illumine étrangement le monde. Le deuil y porte son ombre mais cet ombre, souvent, en souligne, en accuse, en augmente la beauté en même temps que la détresse. (...) C'est ainsi que la mélancolie embellit le présent". (la suite, demain)