Parfois, je trouve dans une cabane à livres un exemplaire des "Poètes d'aujourd'hui". Cette collection modèle et d'exception présente des monographies de poètes qui a été lancée en 1944 par Pierre Seghers, poète, résistant et directeur de revues. Ces petits livres au format particulier, presque un carré de 15, 5 cm sur 13,5 cm se sont vendus à un prix modique pour mettre la poésie à la portée de tous. Chaque volume comportait deux parties : une étude consacrée au poète et un choix pertinent de textes. L'originalité de la collection consistait à confier l'étude du poète à un écrivain ou à un poète. Les premiers numéros concernaient Paul Eluard, Aragon, Max Jacob, Jean Cocteau et Henri Michaux pour citer les cinq premiers. Le premier volume sera vendu à 300 000 exemplaires, un record absolu. Le projet de Pierre Seghers était de montrer "qu'un poète n'est ni un mort du passé, ni un mythe" mais un "homme parmi les autres, un homme fraternel qui vit, qui travaille, qui mange, qui boit". Un artisan du verbe, un citoyen impliqué dans la vie de la cité. L'éditeur-résistant a publié un ouvrage de référence, "La Résistance et ses poètes" pour rendre un hommage à tous ceux et toutes celles qui ont bravé l'interdit, qui se sont levés contre le nazisme et le fascisme. En 1983, il est à l'origine de la création de la Maison de la Poésie de la Ville de Paris. J'évoque la collection pour montrer comment cette époque est bien loin de la nôtre où la poésie n'a plus la place qu'elle tenait dans la moitié du XXe siècle. J'ai découvert dans ma jeunesse un grand nombre de poètes comme Guillevic, Reverdy, Frénaud, Follain, Bonnefoy et tant d'autres classiques aujourd'hui tombés dans l'oubli. Après la collection des poètes, Pierre Seghers a aussi intégré la chanson française et les écrivains d'hier et d'aujourd'hui. Le travail d'éclaireur de Pierre Seghers n'a pas son équivalent de nos jours. Heureusement, l'éditeur Gallimard maintient toujours sa belle collection de poésie avec ses 575 titres depuis 1966. La littérature poétique mérite d'être lue et reconnue. Seghers m'a permis de découvrir les beaux chemins de la langue française.
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