lundi 7 juillet 2014

Revue de presse

J'ai reçu le double numéro du  Magazine littéraire avec un peu de retard et j'ai été un peu déçue par le dossier central : "Comment se détacher du réel (et ne jamais prendre le monde au sérieux) : faites vos jeux !" . Evidemment, en période estivale, il est souhaitable de ne plus penser, de ne pas réfléchir, d'éviter la prise de tête... Je ne suis pas particulièrement attirée par le jeu et je regrette les dossiers d'antan quand un numéro de l'été dernier proposait un dossier sur les 10 grandes voix de la littérature étrangère... Je vais quand même feuilleter les articles sur cet esprit ludique revendiqué par des écrivains comme Rabelais, Montaigne, Caillois, Perec, Queneau et... San-Antonio. Comme le souligne l'éditorialiste, le jeu fait partie de la vie (engouement universel pour les jeux vidéos...) et la rend  plus légère et plus acceptable. La lecture pourrait donc faire partie de la sphère ludique comme une fuite de la réalité, une évasion du quotidien et un voyage initiatique. Mais, au lieu de vider l'esprit, lire le nourrit et l'enrichit avec un plaisir sans fin... On peut aussi découvrir une drôle d'enquête sur les écrivains face à la prostitution, un grand entretien avec Orhan Pamuk, des rubriques sur les nouveautés, des infos sur la rentrée, etc. Le Magazine littéraire a changé avec sa nouvelle maquette, un changement un peu déroutant pour ses lecteurs fidèles... Lire propose les livres de votre été. François Busnel a choisi entre autres,  Maylis de Kerangal, Kundera, Bobin et Philip Roth. On peut lire 15 extraits de la rentrée littéraire (un bon cru d'après la revue). La revue Transfuge dévoile 100 romans cultes en posant la question à un grand nombre d'écrivains et cette tradition revient souvent pour nous donner envie de découvrir des écrivains oubliés et peu connus. On appelle cet exercice, la bibliothèque idéale. Les rubriques sur le cinéma complètent avec intérêt les articles sur la littérature. J'ai aussi acheté Philosophie Magazine pour le livret sur Jankélévitch que j'aime beaucoup, pour les articles sur Régis Debray, sur la génération tatouage, et pour le dossier central sur "Tu veux ou tu ne veux pas ? Comment savoir ce que l'on veut vraiment...". Un numéro vraiment passionnant à lire et ces revues de l'été 2014 me permettent d'attendre les surprises de la rentrée littéraire de septembre !

vendredi 4 juillet 2014

"Un livre peut en cacher un autre"

En fin avril, la librairie Garin m'a offert un cadeau pour fêter la journée mondiale du livre et des droits d'auteur. J'avais acheté quelques livres de poche et je suis repartie avec cet abécédaire illustré par Christian Lacroix. Dans la préface, Marie-Rose Guarnieri, libraire parisienne (et pilote de l'opération de cette fête malheureusement peu connue du public et pas assez soutenue par la presse généraliste), explique la démarche collective de ce cahier alphabétique : "Notre classement alphabétique est la grande loi de l'hospitalité qui permet d'accueillir les lecteurs désireux de se lancer dans l'inconnu. C'est ce jeu-là, correspondant aux 26 lettres de l'alphabet, que nous avons proposé aux 23 écrivains contemporains. L'idée m'est venue de leurs confidences, parfois sur le pas de la porte de la librairie : "ce qui me rend heureux, c'est d'être à côté de..." De là a surgi notre désir de les inviter à écrire sur l'auteur classé en fonds à côté d'eux et avec lequel ils partagent une initiales." Je ne vais pas citer tous les écrivains du recueil mais j'ai choisi quelques affinités : Maylis de Kerangal-Jack Kerouac, Pierre Pachet avec Perros, Pontalis, Pavese, Perec, Wasjbrot-Woolf, Zenati-Zweig. Les textes sont beaux, ainsi que les illustrations à base de lettrines.  Ce petit bijou éditorial deviendra un objet-livre, rare et précieux, et je me réjouis de le glisser dans ma bibliothèque. Rendre hommage à la littérature, aux écrivains et aux libraires devrait se faire tous les jours...  Je cite la dernière phrase mélancolique de Rose-Marie Guarnieri : "Parfois gronde le bruit poignant de la fermeture d'une librairie qui ne s'en sort plus. Entendez et choyez le plus possible celles qui sont encore là. Dans ces lieux de commerce qui ne sont pas comme les autres, les rois, ce sont les livres. Dans la nuit culturelle de plus en plus menaçante, regardez comme brillent ces lucioles que sont vos librairies." Après ce message alarmant, il ne faut pas oublier de se rendre dans une librairie pour remplir les valises et surtout, dès que l'on se rendra dans un coin de France ou d'ailleurs, cherchez donc la librairie pour une visite culturelle... comme un des derniers remparts pour protéger la civilisation du livre et de l'écrit !

jeudi 3 juillet 2014

Des livres chez soi

J'ai été une libraire passionnée mais, hélas, je n'ai pas réussi à assurer mon confort matériel (c'était l'époque du prix libre du livre) dans les années 70 à Bayonne et j'ai été dans l'obligation d'arrêter. J'ai même travaillé dans une maison d'éditions à Paris après avoir fermé mon petit commerce livresque. Puis, j'ai bifurqué vers la fonction publique (Ah la sécurité divine de l'emploi à vie...) qui m'a offert plusieurs postes de bibliothécaire en Rhône-Alpes où j'ai donné "naissance" à trois structures (deux bâtiments neufs et une rénovation d'une usine de textile), animé un réseau départemental (en Isère) et terminé ma carrière en bibliothèque universitaire en Savoie. Et j'ai ainsi passé ma vie professionnelle dans les livres et la médiation culturelle... J'ai eu beaucoup de chance de pratiquer ces métiers merveilleux ! Cet objet en papier, rempli de mots et d'idées, est devenu le fil directeur de ma vie professionnelle. J'avoue aussi mon intérêt pour la bibliophilie. Mes revenus ne me permettent pas d'acquérir des livres rares, précieux et uniques. Pourtant, je possède quelques ouvrages anciens, des Pléiades et quelques beaux livres d'art. J'adore les avoir à ma portée, les feuilleter, les dépoussiérer, les caresser comme des plantes vertes dans la maison. Rassurantes présences. Quand je pénètre dans un salon ou une pièce de vie, je remarque tout de suite leur présence ou leur absence sur les murs. J'ai l'impression que les maisons sans livre sont des maisons sans âme. Je ne suis pas une grande collectionneuse, faute de place chez moi, mais,  j'héberge des poches comme des beaux livres d'art : pas de ségrégation, ni d'exclusion. Je pratique le mélange des genres : grand format, minuscules, brochés, reliés, encartonnés, dépareillés, tachés, lus, pas encore lus, soulignés, intacts, abîmés... Ils me plaisent tous... J'ai vu dans un blog d'écrivain, celui de François Bon, (il l'a baptisé le "Tiers livre"), une rubrique sur l'histoire de ses livres. Cette démarche m'a tout de suite séduite et je conseille d'aller voir ces textes qui racontent la vie de François Bon à travers l'objet livre. Cet écrivain que je trouve très original avait écrit une "Autobiographie des objets" paru il y a deux ans (je l'ai commentée dans ce blog) et il vient de paraître en poche. Quand les écrivains citent leurs nourritures spirituelles et leurs préférences littéraires, c'est souvent un dévoilement de leur personnalité profonde, une confidence amicale qu'ils adressent à leurs lecteurs. Cet été, comme les ateliers d'écriture et de lecture sont interrompus à cause des vacances, je vais inaugurer des nouvelles rubriques : histoire de mes livres (en m'inspirant du blog de François Bon), visites de musée, livres d'art, histoires d'éditeurs, portraits d'écrivains... Même en vacances, j'ai envie de poursuivre cette activité d'écriture, ce Marque-Pages que j'ai démarré en 2010 et qui vit encore, je l'espère,  pour longtemps !
 

mercredi 2 juillet 2014

Rubrique cinéma

Beaucoup de monde ce mercredi pour la dernière journée de la Fête du cinéma (place à 3.50 euros) à l'Astrée de Chambéry. J'ai donc vu le dernier film de Ken Loach, "Jimmy's Hall", sélectionné au Festival de Cannes. La générosité de ce cinéaste se manifeste amplement dans le personnage de Jimmy Gralton, interprété par le beau comédien, Barry Ward. Cet homme, militant communiste, s'est exilé pendant dix ans à New York et il revient dans son Irlande natale auprès de sa mère (quelle belle relation mère-fils !) pour reprendre la gestion de la ferme familiale. Nous sommes dans les années 1930 après la guerre civile dans un pays dominé par les forces "conservatrices" : l'Eglise et les propriétaires terriens. Jimmy rencontre un groupe de jeunes qui lui demandent d'ouvrir une salle de danse, le "Hall", un bâtiment désaffecté qui lui appartient. Ce lieu d'échanges, de formation et d'éducation populaire se met à revivre pour le bonheur de la communauté : ils se remettent à danser, à écouter du jazz, à lire à haute voix la poésie de Yeats,  à discuter de politique, à emprunter des livres, clés de la liberté. Ce foyer de vie va fortement déplaire au curé du village qui mène une guerre contre cette musique moderne et ces idées mécréantes. Les scènes de danse montrent l'énergie vivifiante de ces Irlandais(ses) qui subissent la pauvreté, la misère et le manque d'espoir dans une société ancienne liée aux intérêts de l'Eglise et des nantis. Le cinéaste, très engagé, ne cache pas sa sympathie pour Karl Marx, pour la justice sociale et pour un monde meilleur. Quand une famille est expulsée d'une ferme qu'un propriétaire veut récupérer, les amis de Jimmy se révoltent et la situation va dégénérer dans la violence avec l'incendie du Hall et l'arrestation du militant qui sera exilé aux Etats Unis. Ce film, teinté de nostalgie militante, met en valeur la solidarité et l'égalité, la justice et la liberté et apporte un vent de fraîcheur dans l'ambiance un peu morose et décourageante d'aujourd'hui. Dans cet Irlande archaïque, ces hommes et ces femmes  poursuivent leur rêve de progrès et de partage sans complexe et nous communiquent leur espérance d'un monde meilleur. Un beau film avec une mise en scène classique et un personnage masculin fort "sympathique"... Un grand régal si on aime l'Irlande, la danse, le militantisme et surtout la solidarité des "perdants" face aux puissants (religieux et capitalistes)...  

mardi 1 juillet 2014

"Ceux du Nord Ouest"

Après le pavé de Donna Tart, assez lourd à digérer, j'ai suivi les conseils des "grands connaisseurs" de la littérature (les journalistes littéraires) qui avaient beaucoup mis en avant le dernier roman de Zadie Smith, "Ceux du Nord Ouest", publié chez Gallimard en 2013. Evidemment, j'ai trouvé ce roman intéressant mais j'étais un peu déroutée par la construction du texte, la traduction et les personnages un peu trop éloignés de mon univers personnel (la présence des joints et de la drogue semble banale, incontournable et vraiment symbolique d'une nouvelle façon de vivre... Je vais peut-être m'y mettre...). Si j'ai à peu près compris cet univers citadin, Zadie Smith veut nous faire partager la vie de quatre personnages dans un quartier multiculturel de Londres. Leah est une femme mariée à un coiffeur d'origine algérienne, et elle ne veut pas d'enfant. Elle est l'amie de Nathalie, avocate et qui a changé de prénom pour masquer ses origines. On rencontre aussi Félix et Nathan, hommes en difficultés, perdants, traficoteurs et instables. Ce roman peut convaincre peut-être des lecteurs plus jeunes, habitués à ce style haché, familier, court et parlé (comme des suites de mots, façon textos)... Par curiosité et par devoir, j'ai quand même lu plus de deux cents pages. J'ai trouvé un commentaire sur Amazon qui correspond bien à l'impression que je ressentais en le lisant : un fourre-tout farfelu de dialogues, monologues et descriptions lapidaires sur un monde social difficile à appréhender. Ce roman en forme de "chant choral" m'a peu convaincue et j'ai décroché après avoir lu les trois-quarts du livre. Certains critiques évoquent le "génie" créateur de Zadie Smith, la comparant à une Virginia Woolf du XXIème siècle... La critique littéraire se lance dans des éloges exagérés, excessifs. Je n'ai peut-être rien compris à ce roman qui va marquer la littérature anglaise, dans la lignée de James Joyce ! J'ai remarqué aussi que, de temps en temps, soit par paresse d'esprit, soit par manque d'énergie, un roman peut rebuter un lecteur(trice) et ce n'est pas la peine de s'obstiner pour en comprendre les clés de lecture. La virtuosité de Zadie Smith diminue l'efficacité romanesque et le côté labyrinthique de la construction du texte empêche une lecture linéaire et claire. C'est vraiment dommage car c'est une voix qui demeure originale et surtout ultramoderne dans la description d'un monde urbain, métissé et euphorisant.  Je crois que ces romans antérieurs me semblent plus "lisibles". Je n'aime pas, en général, partager mes déceptions littéraires mais pourquoi les cacher ? Un coup de griffe à la place d'un coup de cœur...

jeudi 26 juin 2014

"Le chardonneret"

J'ai attendu quatre mois à la bibliothèque pour obtenir ce gros pavé, "Le chardonneret" de Donna Tart, publié chez Plon dans la collection "Feux croisés".J'ai quand même consacré un nombre d'heures important pour venir à bout de ces 786 pages, et à la fin de ma lecture-marathon, j'ai éprouvé une légère déception car la critique littéraire s'était montrée enthousiaste, du Monde des livres, aux revues mensuelles traditionnelles à la rentrée de septembre 2013. Ce roman possède évidemment une force romanesque, liée au personnage principal, Théo, un adolescent de treize ans qui va vivre un destin hors du commun. Il se retrouve avec sa mère à New-York dans un musée et il est attiré irrésistiblement par une jeune fille étrange aux cheveux roux, accompagnée par un vieux monsieur. Une explosion éclate dans cet endroit, symbole de l'art massacré et provoque des dégâts humains et matériels. Sa mère fait partie des victimes et Théo assiste à la mort du vieux homme qui lui conseille de dérober un petit tableau, "Le chardonneret". Il accepte aussi une bague étrange. A partir de cet attentat meurtrier, la vie de Théo bascule dans un chagrin sans fin. Il est accueilli par une famille de grands bourgeois new-yorkais et il crée des liens fraternels avec son copain Andy. Il retrouve la trace du propriétaire de la bague et cette découverte va changer sa vie. Il découvre un certain Hobie, antiquaire de son état, ami de ce vieux homme, mort dans le musée. Cet homme va lui donner le goût des vieux meubles anciens, de ce commerce si particulier. Comme Théo a encore un père, celui-ci alors qu'il les avait quittés, lui et sa mère, réapparaît dans sa vie et il est obligé de le suivre. Changement de vie pour Théo qui doit subir ce père absent, incompétent et délinquant. Dans cette période (que j'ai trouvé trop longue), il fait la connaissance de son meilleur ami, un jeune ukrainien, qui va l'initier à la drogue. Ce roman est tellement dense, tellement touffu, que l'on finit par se perdre un peu. Le tableau de Carel Fabritius est caché dans une agence de location. Il est dérobé et le roman se transforme en thriller : Théo se retrouve à Amsterdam (belles descriptions de la ville)  pour récupérer ce tableau convoité par la mafia des pays de l'Est. Et là, je perds le cap... Je poursuis ma lecture sur les amours de Théo (la jeune fille du musée et la sœur d'Andy) et à la fin, il récupère l'argent grâce à son ami qui a confié le tableau à l'Etat. Donna Tart avoue qu'elle compose ses romans tous les dix ans et je comprends son projet après avoir digéré ces quasi 800 pages ... Dans ces pages, l'écrivaine américaine intègre des réflexions sur la vie et ces passages offrent une respiration bienvenue dans la trame du roman. Ce roman à la Dickens peut séduire un grand nombre de lecteurs car Théo est un personnage que les malheurs accablent... Je le recommande pour cet été si vous aimez vraiment les grandes sagas qui racontent des destins singuliers et extraordinaires. Bon courage !

mardi 24 juin 2014

"Typoèmes"

En me baladant dans le secteur poésie de la médiathèque de Chambéry, je suis tombée par hasard sur un livre original, "Typoèmes" de Jérôme Peignot. Romancier, poète, homme de radio, militant engagé dans diverses actions politiques, cet homme singulier s'est aussi spécialisé dans la typographie, un art d'imprimeur qu'il valorise et sublime. On ne porte pas assez d'attention aux caractères d'impression par ignorance et par étourderie. Mais, quand on écrit un texte à la "machine", sur l'ordinateur, l'offre typographique est riche et cela devient même un jeu quand il faut choisir entre l'helvetica, l'arial, le book antiqua, le comic sans SM, le Lucida, le calibri, et bien d'autres possibilités. Des dizaines de "polices" peuvent être utilisées et je me souviens de mes hésitations quand je devais opter pour une forme classique ou originale pour mes outils de communication de la bibliothèque. Dans la préface de son "Typoèmes", Jérôme Peignot avoue son amour des mots, des signes et de l'alphabet, du jeu linguistique. Ce recueil de poèmes-signes peut se lire, se dessiner, s'imprimer, se peindre, aussi... Ce méli-mélo de mots, ce fourre-tout d'images, ce catalogue de symboles forment des calligrammes, des anagrammes, des palindromes (voir wikipedia pour trouver les définitions de tous ces termes techniques...). Il m'est impossible de retranscrire quelques perles du livre car  je ne peux pas utiliser les signes de la ponctuation. Je recommande ce bijou éditorial pour constater le talent immense de cet écrivain-typographe, et surtout pour rendre hommage à ces caractères que l'on ne voit plus, tellement ils sont invisibles. J'aime bien ces "fous" de l'écriture, de la typographie considérée comme un "bel art" en soi et Jérôme Peignot montre bien dans son livre son amour des voyelles, des consones, de la ponctuation, de l'alphabet et des chiffres dans un écrin de poésie, d'humour et de réflexions souvent philosophiques. Un ouvrage rare et précieux...