Cet après-midi, nous étions nombreuses autour de la table pour échanger et partager nos coups de cœur. Avant de démarrer, j'ai voulu rendre hommage aux dessinateurs de Charlie Hebdo : Cabu, Charb, Wolinski, Honoré et Tignous en rappelant que la liberté d'expression est un droit fondamental dans notre République. Nous avons évoqué les terribles attentats, la sidération devant l'écran, et la nécessité de se retirer des faits pour réfléchir sur ces événements tragiques où dix-sept de nos concitoyens ont perdu la vie. J'ai conseillé la lecture de la presse où des historiens, des sociologues, des philosophes nous donnent des clés pour essayer de comprendre la folie meurtrière de ces fanatiques islamistes. Après cette discussion, nous avons démarré la séance sur les coups de cœur. Danièle a proposé "C'était hier et c'est demain", une anthologie de lettres, écrites par les "anciens" et "Une femme drôle" de Maryline Desbiolles, une évocation sensible sur la femme-humoriste suisse, Zouc, bien oubliée aujourd'hui. Véronique a parlé du dernier Modiano, d''Une vie à soi" de Laurence Tardieu et d'un roman peu connu, "L'incertitude de l'aube". Régine a montré son enthousiasme de lectrice pour le superbe roman de Zeruya Shalev, "Ce qui reste de nos vies", un texte sur la difficulté d'aimer, de vivre, de vieillir. Elle a aussi évoqué "Fugue pour violon seul" de Tedi Papavrami, le récit autobiographique d'un musicien qui raconte sa fuite de l'Albanie en 1970 avec ses parents et leur exil à Paris. Mylène a choisi "L'amour et l'oubli" d'André Brink, un grand écrivain sud-africain qu'elle apprécie beaucoup. Et elle a mis en relation le très bon roman de Doris Lessing, "Victoria et les Staveney" avec le film sorti récemment, "Victoria". Une petite fille, née d'une liaison entre Victoria et le fils de famille, réapparait chez les Staveney qui la reçoivent à bras ouverts. Mais, Victoria en présentant sa fille à cette famille bourgeoise, va peut-être la perdre. Evelyne a présenté un ouvrage de Lola Sémonin, "La madeleine de Proust, une vie", ou la vie en Franche-Comté de 1925 à 1939 dans une langue, pleine de mots et d'expressions franc-comtoises. Sylvie a vraiment apprécié "La femme coquelicot" de Noëlle Chatelet et "Villa avec piscine" d'Hermann Koch, un thriller psychologique de grande qualité. Geneviève a mentionné la trilogie de Peter May, un écrivain écossais qui écrit de très bons "polars" : "Le braconnier du lac perdu", "L'île des chasseurs d'oiseaux", "L'homme de Lewis". Elle nous a lu une petite nouvelle pleine d'humour sur le "vieillir" des femmes de Paul Fournel, choisie dans l'anthologie "Les grosses rêveuses". Voilà pour les coups de cœur éclectiques de l'atelier...
des critiques de livres, des romans, des moments de lectures, des idées de lecture, lecture-partage, lecture-rencontre, lectures
mardi 20 janvier 2015
lundi 19 janvier 2015
"L'homme de la montagne"
Pour se changer les idées en ces temps troubles et pesants, rien de tel qu'un livre qui vous embarque vers des rivages romanesques. J'ai fini de lire "L'homme de la montagne" de Joyce Maynard, un roman américain qui ressemble à un thriller, à un "policier" mais il détient une profondeur psychologique que l'on ne trouve pas toujours dans cette catégorie littéraire. Un étrangleur de jeunes femmes commet ses crimes dans une montagne proche de la petite ville où vivent deux sœurs, Patty et Rachel. Leur père, inspecteur de policier, est chargé de l'enquête. Il est séparé de la mère des deux adolescentes. Rachel tient la plume et raconte l'angoisse des habitants face à ces meurtres inexpliqués et effrayants. L'inspecteur Toricelli, malgré ses compétences et son énergie, ne trouve aucun indice sur les lieux du crime. Le meurtrier frappe régulièrement à quelques mois de distance et exécute ses victimes selon des rites précis : chevilles attachées avec des lacets, yeux scotchés avec de l'adhésif. Et aucune piste ne se révèle pour arrêter cet abominable traqueur de femmes. Les deux adolescentes mènent une enquête parallèle pour aider leur père jusqu'à prendre des risques elles-mêmes pour attirer l'assassin dans la montagne. Le père, un héros aux yeux de ses filles, se délite sous leurs yeux à cause de son impuissance à neutraliser cet assassin insaisissable et mystérieux. Joyce Maynard livre une belle ode à l'adolescence féminine, avec ses candeurs comme avec ses frayeurs, avec son malaise de vivre comme avec son envie de vivre. Ce roman d'apprentissage décrit avec acuité la complexité des relations entre les deux sœurs et la maladresse affective dans la famille, entre une mère neurasthénique et un père découragé. J'ai pensé à Carson Mac Cullers qui raconte avec génie le monde de l'adolescence. Joyce Maynard a écrit précédemment deux très bons romans : "Long week-end" et "Les Filles de l'ouragan". Une écrivaine américaine, pleine de promesses, à découvrir.
jeudi 15 janvier 2015
"Le complexe d'Eden Bellwether"
Ce premier roman, écrit par un jeune écrivain anglais, Benjamin Wood, est passé assez inaperçu pendant la rentrée littéraire de septembre et malgré des articles de qualité dans la presse. Il a obtenu le prix Fnac en 2014. Edité chez Zulma, ce pavé de 508 pages ne peut plaire qu'à des lecteurs(trices) qui aiment le souffle d'un romanesque original, la complexité d'une intrigue, des personnages subtils, un lieu emblématique et une atmosphère mystérieuse. L'histoire se déroule à Cambridge de nos jours dans le décor très british de King's College, une des plus grandes universités anglaises. Le jeune Oscar, aide-soignant dans une maison de retraite, entend de la musique d'orgue provenant d'une chapelle et il rentre pour écouter. Il rencontre à ce moment précis une jeune fille, Iris, la sœur de l'organiste. Sa vie va changer car, lui, le garçon simple, commence à fréquenter le cercle d'amis qui gravitent autour d'Eden, un jeune homme exalté. En effet, Eden est persuadé qu'il possède un don de guérison en utilisant la musicothérapie. Il a déjà un charisme certain, séduit son entourage et manipule ses amis. Sa sœur, Iris, s'attache à Oscar et elle lui demande de l'aider pour observer son frère et noter son comportement irrationnel. Elle pense même que son frère n'a pas toute sa raison. Pour mettre à l'épreuve les talents imaginaires d'Eden, Oscar lui présente un ami d'un pensionnaire, psychologue-écrivain, atteint d'une tumeur au cerveau incurable. Eden veut le soigner et s'ensuivent des séances de musicothérapie régulières. Son projet de guérison par les sons, inquiète Oscar, le seul personnage qui résiste au charisme de ce garçon étrange. Va-t-il finir par contrecarrer ses projets thérapeutiques insensés ? Benjamin Wood envoûte ses lecteurs à travers un labyrinthe où les personnages se croisent sans vraiment se connaître, s'aiment sans vraiment communiquer, dans un halo de non-dits et de faux fuyants. Oscar rassure le lecteur(trice) alors d'Eden l'inquiète. Il faut donc découvrir ce jeune et talentueux Benjamin Wood, un écrivain à suivre, dorénavant...
mardi 13 janvier 2015
Atelier d'écriture
Aujourd'hui, premier atelier d'écriture de l'année 2015. Nous étions une bonne dizaine à nous retrouver pour écrire. Marie-Christine nous a proposé deux exercices sur le thème des livres, ce qui m'a littéralement ravie. Il fallait choisir des livres que nous avons offert pendant les fêtes de Noël. On a mélangé les titres et j'ai tiré au sort "Marina Belleza" et "Soumission". Marie-Christine nous a lu un texte de Bruno Frappat sur les livres, encore des valeurs sûres quand on veut faire des cadeaux et notre texte devait se terminer par : "Celui-là, quelqu'un en veut ?". Voici mon texte :
"J'adore la littérature italienne et je suis curieuse des dernières parutions. J'ai trouvé "Marina Belleza" de Silvia Avellone. Je ne parle pas la langue de Dante, mais j'imagine en entendant ces mots, une jeune fille au bord de la mer, la vie fourmillante d'un quartier de Naples, les couleurs vivifiantes des façades, les odeurs des oranges, de la mer et du ciel, les bruits étourdissants des scooters et des Fiat. Ce livre va illuminer ma fin d'année et l'Italie pourrait porter ce beau nom de Marina (la mer) Belleza (belle). J'offrirai ce bout de soleil en plein hiver mais, je me suis offert côté ombre, le dernier Houellebecq, "Soumission", roman décrié, roman rejeté. Et pourtant, si la République s'endort, le réveil sera rude comme on l'a tous vécu la semaine dernière. Coup de semonce, la haine a tué. Cet écrivain pose des vraies questions sur notre société. Son angoisse, sa déréliction, sa misanthropie, son désespoir reflètent notre condition humaine. Son roman fait peur mais ce bain glacé dans une littérature dérangeante peut aussi révéler en nous un esprit de résistance. Celui-là, quelqu'un en veut ?"
Deuxième exercice très court (10 minutes pour l'écrire) sur le droit de lire d'après les consignes de Daniel Pennac, "Comme un roman".
"Le droit de lire dans mon lit alors que le monde s'agite,
le droit de lire dans un bain, alors que le monde se noie,
le droit de lire dans un arbre alors que le monde perd son âme,
le droit de lire sur un nuage alors que le monde s'enrage,
le droit de lire sur un banc alors que le monde choisit l'écran
le droit de lire sur une plage alors que le monde s'ensable
le droit de lire, un droit universel, un droit essentiel."
"Le droit de lire dans mon lit alors que le monde s'agite,
le droit de lire dans un bain, alors que le monde se noie,
le droit de lire dans un arbre alors que le monde perd son âme,
le droit de lire sur un nuage alors que le monde s'enrage,
le droit de lire sur un banc alors que le monde choisit l'écran
le droit de lire sur une plage alors que le monde s'ensable
le droit de lire, un droit universel, un droit essentiel."
lundi 12 janvier 2015
Dimanche 11 janvier, la marche républicaine
J'ai arrêté d'écrire jeudi dernier après l'attentat sanglant contre Charlie Hebdo. Le lendemain, une jeune policière municipale a été abattue par le troisième fanatique islamiste qui a terminé sa folle cavale meurtrière dans un hypermarché casher en massacrant quatre Juifs. On vit dans un cauchemar depuis jeudi et même si quelques millions de citoyens sont descendus dans la rue, je ne suis pas rassurée par les temps qui viennent. On entend des mots terribles dans les médias, dans la presse : terreur, terrorisme, guerre, violence, tuerie, carnage, otage, exécution, fanatisme, folie meurtrière, antisémitisme. Après ces actes traumatisants, l'émotion nous a tous submergé(e)s avec la force d'un slogan poétique que l'on pouvait décliner selon des identités diverses : je suis Charlie, je suis Juif, je suis Policier. Je dirai aussi pour ma part : je suis Française ou je suis Républicaine. Mon appartenance aux valeurs républicaines transcende tout le reste, et nos croyances ou notre athéisme doivent se confiner dans la sphère privée. Je préfère évoquer l'immense et salutaire solidarité des citoyens face aux attaques mortelles et ignobles qu'ont subi des dessinateurs représentant la libre pensée, des policiers représentant la protection des citoyens, des juifs, éternelles victimes de l'intolérance. Ces néo-nazis, ces néo-fascistes sèment la panique et la peur par idéologie et par la haine de tout ce que notre pays symbolise : une terre de liberté, d'égalité entre les hommes et les femmes, de paix, d'éducation et de culture pour tous quelque soit ses origines. On a tous envie de revenir à une vie normale, apaisée et ce matin, je me suis retrouvée dans un groupe d'étude consacrée aux "Fleurs du Mal" de Baudelaire. Le professeur-animateur nous a proposé de commenter cette marche républicaine et deux mots magnifiques ont été écrits sur le tableau : laïcité, liberté. Nous avons parlé de Voltaire, évidemment, de Diderot, de Rousseau, des Lumières, un retour heureux à la culture et à la littérature.
jeudi 8 janvier 2015
"Je suis Charlie"
Ce cri de ralliement veut montrer la solidarité nationale face à la nouvelle barbarie du fanatisme islamique. J'ai hésité à évoquer cette tragédie de mercredi où deux (ou trois) criminels lâches ont abattu froidement douze victimes dont Cabu, Wolinski, Charb et Tignous sans oublier les deux policiers. En tant qu'ancienne libraire et bibliothécaire, j'ai diffusé pendant des années l'humour insolent et salutaire de la bande à Cabu. Les assassins d'hier ont voulu tué des intellectuels, une forme de la pensée française fondée sur la satire, l'ironie, la blague. Ils étaient du côté de l'athéisme et se moquaient des grands dogmes religieux comme des politiciens ou des banquiers. Ils aimaient la liberté, la légèreté, la démocratie, la paix et l'harmonie. Comme l'a dit mon professeur de philo, ces criminels ont massacré l'idée, l'intelligence et la culture comme des Socrate contemporains. On peut parler d'effondrement moral, de fragilité des sociétés occidentales, de pertes des valeurs républicaines. C'est vraiment un jour de deuil pour la civilisation occidentale où chaque citoyen(ne) peut vivre dans la plus totale des libertés. Mais, il faut résister, ne pas plier, rester debout et ne jamais renoncer à nos valeurs républicaines qu'il faut enseigner à grande échelle dans nos écoles, nos collèges et nos lycées... Le terrorisme islamique ne doit pas nous intimider malgré l'irruption de la barbarie au cœur de Paris, dans un local de Charlie Hebdo et des hommes formidables de générosité (ils voulaient nous faire rire), des antiracistes, des libertaires, sont morts pour faire vivre la liberté de penser, de critiquer, d'ironiser, de croire ou de ne pas croire. Nous sommes tous Charlie et ce mercredi 7 janvier a été une sale, une très sale journée, une très triste journée.
mardi 6 janvier 2015
Ma liste de mes 10 meilleures séries
Cela fait longtemps que je regarde des séries, surtout le soir. Voici ma liste pour les amateurs "sériephiles" :
- "Homeland 3" pour l'héroïne bipolaire et l'ambiance de notre monde d'aujourd'hui,
- "Real humans" une série vue sur Arte, formidable sur les robots humanoïdes,
- "The Bridge" , un thriller haletant avec des enquêteurs atypiques danois-suédois,
- "House of cards", un couple machiavélique d'ambitieux politiques à Washington,
- "Broadchurch", une série policière de très grande qualité avec un inspecteur tourmenté,
- "Hatufilm", une série israélienne traitant un sujet délicat de prisonniers de guerre libérés,
- "The Killing", une inspectrice empathique qui délaisse sa propre vie pour son métier,
- "The Americans", le portrait d'espions russes dans la peau d'un couple d'américains moyens,
- "Rectify", un homme accusé de meurtre est innocenté et revient dans sa petite ville,
- "True Detective", un détective inquiétant dans une atmosphère inquiétante, une série culte.
La chaîne Arte diffuse souvent des séries intelligentes et subtiles comme "Real Humans" par exemple. Suivre la plupart du temps une dizaine d'épisodes en plusieurs saisons consécutives procure un sentiment de continuité, de fidélité et de partage. On se sent en rendez-vous ou en visite et retrouver les personnages qui vieillissent en même temps que nous est un phénomène que des sociologues ont étudié. Ce cinéma de salon peut apporter le même plaisir que le cinéma de salle... Les séries que je cite sont loin d'être débiles (il en existe aussi de très mauvaises) et traitent des thèmes sociétaux, politiques, historiques, psychologiques, dignes du cinéma traditionnel.
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