Trois "génies" se retrouvent à Londres en juillet 1938 : Sigmund Freud, Stefan Zweig et Dali ! Clemence Boulouque les réunit malicieusement dans son nouveau roman, "Le sentiment des crépuscules", publié chez Laffont. Freud, tout juste exilé de l'Autriche nazie, s'installe à Londres grâce à l'aide précieuse de Marie Bonaparte. Stefan Zweig, ami très proche du psychanalyste, a organisé un rendez-vous sur l'insistance de son ami peintre, le surréaliste Salvador Dali. Accompagné de sa compagne, Gala, il veut offrir une de ses toiles au maître des rêves et de l'inconscient. Un quatrième comparse partage cette rencontre, un Anglais, Edward James, poète et écrivain. Freud, âgé de 82 ans, souffre d'un cancer de la mâchoire. Sa fille Anna est présente dans cette assemblée restreinte. Stefan Zweig, toujours pondéré et modéré, semble gêné par son ami, Dali, imprévisible et surprenant. Il est dans sa trentaine et commence à être célèbre. Face à ses deux grands sages du monde ancien et d'une intelligence lumineuse à la manière d'un Montaigne, le peintre espagnol préfigure le monde nouveau après la catastrophe de la Deuxième Guerre mondiale. Leurs discussions diverses abordent des sujets éclectiques : des escargots à Lorca, de Vienne à l'exil, de Londres à la psychanalyse. Dans un article d'un journal quotidien, l'autrice raconte sa démarche littéraire. Comme personne n'avait évoqué cette rencontre exceptionnelle entre ces trois créateurs, elle a imaginé ce rendez-vous en se basant sur une documentation très pointue. Au crépuscule de leurs vies, les deux protagonistes principaux, Freud et Zweig, allaient mourir, l'un en 1939, vaincu par son cancer et l'autre en 1942, se suicidant avec sa nouvelle compagne, Lotte. Seul, ce jeune homme délirant a toujours "cet appétit du monde, de l'autopromotion". Le peintre espagnol déclare alors : "Je participe à la crétinisation du monde, puisque ce monde est crétin". Clémence Boulouque a voulu "humaniser" ces trois monstres sacrés dans leur destin douloureux. J'ai lu ce roman biographique par curiosité, surtout pour Freud et Zweig, bien plus attachants que Dali à la personnalité narcissique plus proche d'un adolescent que d'un adulte. A découvrir.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire