Annette a évoqué un essai de Jean Giono, "Pour saluer Melville", publié en 1941 et disponible aujourd'hui dans la collection "L'Imaginaire" chez Gallimard. L'écrivain rend hommage à un "frère", Herman Melville dans ce beau récit, devenu un classique. Il a traduit "Moby Dick" avec Lucien Jacques et il raconte dans son essai que ce vaste et splendide roman l'a accompagné depuis de nombreuses années. Il écrit : "Il me suffisait de m'asseoir, le dos contre le tronc d'un pin, de sortir de ma poche ce livre qui déjà clapotait pour sentir se gonfler sous moi et autour la vie multiple des mers". Annette m'a donné envie de lire cet essai que je n'ai pas encore lu et surtout de relire "Moby Dick", un chef d'oeuvre de la littérature américaine. Geneviève a beaucoup aimé un premier roman sélectionné dans le cadre du Festival de Chambéry, "Camera obscura" de Gwenaëlle Lenoir, publié chez Julliard. Ce roman percutant raconte l'histoire d'un photographe militaire qui voit arriver à l'hôpital des corps torturés. Il photographie ces victimes sans poser des questions car son pays s'abîme dans la terreur. Peu à peu, il comprend qu'il est le seul témoin de cette barbarie institutionelle. Ce pays ressemble à la Syrie. Cet homme ordinaire devient l'archiviste de l'horreur et il lui faut un courage exceptionnel pour témoigner contre un état totalitaire. L'autrice s'est inspirée d'un militaire hospitalier qui vit caché quelque part en Europe. Tout est vrai dans ce roman qui, parfois, semble difficile à lire. La littérature sert aussi à dénoncer la noirceur de l'âme humaine et des régimes politiques dictatoriaux. Danièle a lu et apprécié un roman de Béatrice Commengé, "Ne jamais arriver", publié chez Verdier. La narratrice évoque l'île, "l'Insula Ovidiu", un port lointain de la Mer Noire où fut relégué Ovide par Auguste à l'aube du premier millénaire. Ce lieu "ovidien" l'a plongée dans une rêverie heureuse mais quand elle doit entreprendre son voyage, au seuil de l'année 2020, l'épidémie du Covid l'empêche de partir... Récit de voyage à la rencontre d'un poète et récit autobiographique d'une grande douceur. Pour l'écrivaine, "le livre est peut-être, avant tout, un désir de solitude et de calme bienvenu", écrit une lectrice sur ce beau texte qui donne envie de découvrir, Ovide, le poète latin des "Métamorphoses" et de "L'art d'aimer". Danièle, connaissant ma passion de l'Antiquité greco-romaine m'a très gentiment offert l'ouvrage et je l'en remercie encore. Voilà pour les coups de coeur de décembre. Nous nous retrouverons le jeudi 16 décembre à la Base pour le premier atelier de 2025 !
des critiques de livres, des romans, des moments de lectures, des idées de lecture, lecture-partage, lecture-rencontre, lectures
lundi 30 décembre 2024
vendredi 27 décembre 2024
Atelier Littérature, les coups de coeur, 1
Agnès a démarré la séquence, "coups de coeur", avec "Les Dames de guerre" de Laurent Guillaume, paru cette année chez Robert Laffont. En septembre 53, la rédaction de Life magazine envoie en Indochine une journaliste, Elizabeth Cole, afin de remplacer le reporter de guerre, mort pendant le conflit. Devenu correspondante de guerre, la journalisre réalise son rêve professionnel. Mais, elle ne s'attendait pas à vivre une aventure pareille quand elle enquête sur la mort de son collègue au coeur d'un nid d'espions, d'escrocs, de tragiquants d'armes. L'arrière-plan historique du roman a beaucoup intéressé Agnès qui nous a donné envie de lire ce roman documentaire, mais aussi un roman d'espionnage "addictif", une plongée sur les terres asiatiques en temps de guerre avec une héroïne attachante. Véronique a présenté un récit de vie de Lidia Maksymowicz, "La petite fille qui ne savait pas haïr", paru en Poche. La famille de Lidia Maksymowicz, catholiques d'origine biélorusse, est déportée au camp d'Auschwitz-Birkenau en 1943. La petite Lidia n'a que trois ans et l'horrible Mengele la remarque pour ses expériences. Heureusement, Lidia survit et elle est confiée à une famille polonaise après la disparition de ses parents. Elle grandit dans cette famille mais elle pense à sa mère qui a peut-être survécu à cet enfer. Un miracle a lieu quand elles se retrouveront sur un quai de gare à Moscou en 1963. Un témoignage émouvant à découvrir avec une jeune femme, Lidia, qui renonce à la haine, car "Haïr, c'est souffrir encore plus". Odile a lu et apprécié "Les Impatientes" de Djaïli Amadou Amal, paru en 2020 et prix Goncourt des Lycéens. Ce roman raconte le destin de trois femmes au Cameroun, subissant leur sort dans des mariages forcés, des viols conjugaux et des violences intolérables. Ces femmes "impatientes" veulent se libérer de ce joug ancestral et patriarcal. Un roman dénonçant la polygamie dans un pays musulman et l'autrice a bien du courage de décrire ces situations invraisemblables. Elle s'est affirmée en militante féministe dans l'association "Femmes du Sahel".
jeudi 26 décembre 2024
Atelier Littérature, 3
Régine et Danièle ont bien aimé "La Lectrice disparue" de Sigridur Hagalin Björnsdottir, (le résumé de l'intrigue est dans ce blog). Les deux personnages principaux, Edda, la soeur en fuite et Einar, son frère à sa recherche forment un duo improbable. L'une a la passion de lire, l'autre souffre de dyslexie. Paradoxalement, cette différence frappante renforce leur relation frère-soeur. Ils finiront par se retrouver à New York et se dévoileront leurs secrets, longtemps occultés. Un roman islandais tout à fait singulier. Régine m'a envoyé cette citation : "Nous devons reprogrammer notre cerveau pour acquérir ces facultés (lire et écrire). C'est là un point important : notre cerveau abrite des zones qui nous permettent de parler et d'écouter, de nous rappeler des choses et d'en imaginer, de traiter les informations visuelles, mais aucune n'est dévolue à la lecture. Lorsque nous apprenons à lire, le cerveau doit fabriquer de nouvelles connexions entre ces zones, et en réalité, il crée une nouvelle zone cérébrale". Ce roman original et intrigant pose des questions sur la lecture sur le plan neurologique. Odile était absente ce jeudi mais elle m'a envoyé un message pour le livre qu'elle avait choisi, "La librairie sur la colline" d'Alba Donati. Pour elle, cette "escapade toscane et littéraire est une belle ode à la littérature et aux librairies indépendantes. C'est toute une ambiance, un lieu de vie, de rencontres. On choisit un livre dans un décor où se mêlent littérature et nature. C'est plein de poésie". Personne n'a lu le récit autobiographique d'Agnès Desarthe, "Comment j'ai appris à lire", publié en 2014. L'écrivaine raconte son enfance de "non-lectrice" et son rejet de la lecture correspond à un esprit rebelle où elle refusait le monde des livres, trop conforme à une identité qu'elle ne ressentait pas. Après des études de lettres anglaises, elle réussit à devenir traductrice et quand elle découvre quelques écrivains dont le merveilleux Singer, si proche de son univers personnel, elle tombe dans les bras de la littérature. Cette enquête sur ce phénomène d'un désir entravé ressemble à une auto-analyse sincère et intéressante. Elle écrit : "A présent que lire est devenu mon occupation principale, mon obsession, mon plus grand plaisir, ma plus fiable ressource, je sais que le métier que j'ai choisi, le métier d'écrire, n'a servi et ne sert qu'une cause : accèder enfin et encore à la lecture, qui est à la fois le lieu de l'altérité apaisée et celui de la résolution, jamais achevée, de l'énigme que constitue pour chacun sa propre histoire". Jolie définition de la lecture, à méditer.
lundi 23 décembre 2024
Atelier Littérature, 2
Annette a beaucoup apprécié le roman d'anticipation de Ray Bradbury, "Farenheit 451", paru en 1955 chez Denoël. Cette dystopie remarquable raconte l'histoire du pompier Guy Montag qui, au fil des jours, prend conscience de l'importance des livres dans une société totalitaire, ennemie de la pensée et de la liberté. La lecture est bannie car elle représente une source de questionnement et de réflexion, antisociale. Le pompier en question est chargé de brûler les livres déténus par la population récaciltrante. Il est interdit de les posséder. Bradbury décrit avec une prémonition inouï notre société actuelle avec le triomphe de l'écran et de l'intelligence artificielle : "La scolarité est écourtée, la discipline se relâche, la philosophie, l'histoire, les langues sont abandonnées, l'anglais et l'orthographe de plus en plus négligés, et finalement presque ignorés. On vit dans l'immédiat. Pourquoi apprendre quoi que ce soit quand il suffit d'appuyer sur des boutons ?". Evidemment, l'intrigue du roman est foisonnante et il faut lire ce livre pour suivre le héros principal qui finit par se révolter. Il rejoint des "marginaux" qui ont la capacité de retenir par coeur le contenu d'un livre après une seule lecture. Ils se déclarent comme des "couvertures de livres". Un beau roman de science-fiction sur l'absolue nécessité de conserver la civilisation de l'écrit. d'affirmer avec conviction la place majeure des livres dans toute société libre et démocratique. Geneviève a lu "Mais la vie continue" de notre regretté Bernard Pivot. Un texte agréable, plaisant, d'un octogénaire sage, bienveillant et malicieux qui donne des conseils pour bien vieillir : "La bonne humeur, le rire, le persiflage, l'autodérision sont des huiles bienfaisantes dont je puis démontrer qu'elles allongent la vie, mais qui, c'est évident, rendent celle-ci plus légère, moins angoissant". Dans cet ouvrage, il n'évoque pas le thème de la lecture mais cet homme-livre qui en dévorait cinq à dix par semaine a glorifié la lecture, un besoin vital pour ce passeur de mots, charmant et populaire. Son "Apostrophes" a marqué des générations entières ! Nostalgie d'une époque révolue ! On se souvient encore de la célèbre dictée qui mettait à l'honneur notre langue française, une initiative inimaginable de nos jours...
vendredi 20 décembre 2024
Atelier Littérature, 1
Le dernier Atelier Littérature 2024 s'est tenu à la Base ce jeudi 19 décembre et malgré quelques absentes, nous étions heureuses de nous retrouver autour d'une table pour partager notre amour de la lecture. Justement, la lecture, cet acte si simple d'aspect, se révèle bien plus complexe en vérité. J'avais proposé une liste d'ouvrages sur ce thème en décembre. J'ai présenté la bibliographie de janvier sur notre si belle capitale, Paris, qui appartient à nous tous et toutes et pas seulement aux Parisiens et Parisiennes. La cité si décriée parfois mais aussi célébrée par sa beauté architecturale méritait un atelier surtout après l'ouverture de la grandiose cathédrale, Notre-Dame-de-Paris. Entre décembre et janvier, ces lectures nous transporteront sur les bords de la Seine. Agnès a démarré la séance avec "Le Liseur" de Bernhard Schlink, paru en 1995 chez Gallimard. Notre amie lectrice a découvert ce roman avec intérêt même si ce n'est pas une lecture facile. L'histoire d'amour de ce jeune adolescent de quinze ans pour une trentenaire peut déjà déranger d'autant plus que le personnage d'Hanna est une ancienne gardienne d'un camp de concentration... La lecture demeure un leit-motiv tout au long du récit car l'amante du garçon vit dans la honte de son analphabétisme, plus grave à ses yeux que son engagement auprès des nazis. L'écrivain allemand pose le problème de la culpabilité des générations impliquées dans le nazisme. Hanna finira par se suicider en prison avant sa libération. Véronique et Danièle ont choisi "Les Chats éraflés" de Camille Goudeau, publié en Folio en 2023. Nos deux amies lectrices ont bien aimé ce premier roman. Soizic, vingt-deux ans, quitte sa Touraine et ses grands-parents alcooliques. Elle s'installe à Paris et son cousin lui propose de devenir bouquiniste sur les quais de la Seine. Entre les livres, les passants et les "égarés", sa vie va changer, surtout en recherchant sa mère à Paris, une mère qui avait abandonné Soizic. Un excellent premier roman et attendons son deuxième ouvrage pour confirmer son talent. Odile a présenté "Dehors la tempête" de Clémentine Mélois, paru en livre de poche en 2022. L'écrivaine raconte ses lectures passionnelles et car, pour elle, "Tout commence par la lecture". Odile a beaucoup aimé cet éloge des livres, de la littérature et de la lecture. Un livre plaisant, enthousiaste qui donne envie de comparer sa propre bibliothèque à celle de Clémentine Mélois.
mercredi 18 décembre 2024
"Le Liseur", Bernhard Schlink, 2
Bernhard Schlink justifie le sujet délicat de son roman ainsi : "J'ai écrit un livre sur ma génération, sur le rapport qu'elle entretient avec la génération de ses parents et la façon dont elle appréhende les actes de ces derniers". Tout au long du texte, une tension permanente persiste entre l'histoire personnelle du narrateur et celle de cette femme-bourreau, analphabète honteuse, mais qui semble toujours nier la réalité de ses actes atroces dans le camp de concentration. Hannah Arendt dénonçait cette attitude dans l'expression, "banalité du mal", en suivant le procès d'Eichmann, un "banal fonctionnaire" parmi des milliers d'autres, obéissant aveuglèment aux ordres supérieurs des nazis. L'obsession du jeune Michael pour sauver cette femme par la lecture à voix haute est une "mission" qui la sortirait de son trou noir, de son aveuglement sur le mal absolu que représente le totalitarisme nazi, une idéologie barbare. Pourtant, la puissance du savoir et de la culture n'a pas évité cette grande catastrophe du XXe siècle. Le personnage féminin semble glacial et inaccessible et dans une scène du roman, elle peut aussi avoir des gestes violents envers son jeune amant. Seuls les moments de lecture lui apportent une atmosphère paisible. Grâce à ce "liseur" généreux et compatissant, elle pourrait accéder à une ouverture au monde et surtout retrouver la dignité. Le geste ultime d'Hanna, son suicide par pendaison, peut s'interpréter comme une prise de conscience d'un passé trop lourd à supporter. Les livres ont peut-être déclencher en elle des remords de son adhésion aveugle à la pire période de son pays. Ce roman a été adapté au cinéma par Stephen Daldry en 2008. Hanna était interprété par Kate Winslet. La notion de culpabilité demeure le sujet central du roman : Hanna, coupable de sa banalité et de son vide existentiel, Michael, coupable par sa fascination sexuelle pour une femme étrange, la société, coupable de ne pas éduquer ses citoyens. Le narrateur écrit : "La souffrance que me causait mon amour pour Hanna était d'une certaine façon le destin de ma génération, le destin allemand auquel je pouvais me soustraire plus difficilement". Un roman allemand important à découvrir ou à relire qui n'a rien perdu de son actualité trente ans après sa parution.
mardi 17 décembre 2024
"Le liseur", Bernhard Schlink, 1
Ce roman de Bernhard Schlink, "Le Liseur", paru en 1995 chez Gallimard dans la collection "Du Monde entier", n'a pas perdu sa force et sa densité. Je l'ai relu récemment pour l'Atelier Littérature du 19 décembre. Et à ma deuxième lecture, j'ai été plus intéressée par la thématique de la Shoah et comment cette tragédie a marqué les générations postérieures à l'événement en Allemagne. Un adolescent, Michael Berg, rencontre par hasard une femme plus âgée que lui. Hanna Schmitz a trente cinq ans et travaille comme conductrice de tramway dans une ville allemande. Il est attiré par cette femme mystérieuse et discrète qui l'initie à la sexualité. La lecture à voix haute tient une place importante dans leur liaison clandestine. Elle lui demande de lui lire des textes et Michael se prête volontiers à ce jeu. Imprévisible et indifférente, elle disparait de la vie du jeune Michael, six mois après le début de leur relation amoureuse. Sept ans après, le jeune homme, étudiant en droit, retrouve Hanna sur les bancs d'un tribunal. Ce séisme le bouleverse. Son ancienne amante est accusée d'un crime lors de l'évacuation du camp d'Auschwitz. En fait, cette femme secrète a toujours gardé le silence sur son passé horrible où elle était gardienne du camp nazi. Ses collègues nazies lui imputent le crime et Hanna ne se défend pas. Michael comprend alors son mutisme d'antan et prend conscience de son analphabétisme. Dans le camp, elle choisissait des prisonnières pour qu'elles lui lisent des livres. Hanna part en prison et Michael, loyal envers elle, lui envoie des cassettes qui contiennent des textes qu'il enregistre. Hannah enprunte les livres à la bibliothèque et peu à peu, elle apprend enfin à lire. Dix-huit ans passent ainsi dans cette prison. Michael se marie, a un enfant et divorce, mais il garde un lien même ténu avec cette femme dont il a certainement pitié. La directrice de prison appelle Michael pour lui annoncer sa libération et il accepte de s'occuper d'elle en lui trouvant un logement. Mais, quand il vient la chercher, il apprend son suicide et elle a légué quelques milliers de marks à la personne à une prisonnière du camp, une survivante qui a témoigné lors de son procès. Cet héritage est refusé par cette femme qui donne l'argent à une association juive. (La suite, demain)
lundi 16 décembre 2024
"La Lectrice disparue", Sigridur Hagalin Björnsdottir
Sigridur Hagalin Björnsdottir, écrivaine islandaise, est journaliste et dirige le service des informations de la télévision publique dans son pays. Dans son roman, "La Lectrice disparue", paru en 2024 dans la collection Babel chez Actes Sud, une jeune bloguese, Edda, s'enfuit de chez elle sans donner aucune explication. Elle abandonne son mari et son bébé de trois jours. La police mène une enquête et découvre sa présence à New York. Einar, son frère fusionnel, ne comprend pas l'attitude de sa soeur et il accepte de partir à sa recherche. Ce frère, pêcheur, fou amoureux de la nature immense islandaise, va découvrir une cité américaine aux antipodes de son pays natal. Pourquoi cette fratrie est-elle aussi unie ? Leurs mères respectives vivent ensemble pour les élever car les enfants ont le même père, un père cinéaste la plupart du temps absent de leurs vies. Cet homme fantasque et original a séduit Julia, la mère d'Edda et il a trompé Julia avec Ragneidur, enceinte d'Einar. Les deux femmes se rencontrent et décident de partager leur appartement pour élever leurs progénitures. Les deux enfants sont profondément différents. Le garçon est dysléxique et la fille dévore les livres. Elle lui lit beaucoup d'histoires et possède une mémoire exceptionnelle. La lecture l'isole des autres et son frère au contraire entretient des rapports aux autres. Ils semblent former la même personne et trouvent ensemble un équilibre. Le roman se présente sous plusieurs points de vue : celui des deux mères, d'Einar à New-York, de sa soeur. L'autrice aborde plusieurs sujets : la crainte du numérique, la perte de l'écrit, des mots, des légendes, des contes, la complexité des relations familiales, les réseaux sociaux. Le frère finira par retrouver sa soeur et il lui avouera des secrets du passé. Il faut lire ce roman original et dense pour comprendre la fuite d'Eddar aux Etats-Unis. Entre l'Islande des années 90 et le New-York d'aujourd'hui, ce roman-thriller aborde le problème majeur de l'influence de la lecture sur l'éducation tout au long de la vie et sur son éventuelle disparition dans un monde connecté.
jeudi 12 décembre 2024
"La Bella estate", film italien de Laura Luchetti
J'ai vu récemment un film de Laura Luchetti, "La Bella estate", tiré d'un roman de Cesare Pavese. Je m'intéresse à cet écrivain italien que j'ai redécouvert grâce au délicat roman de Pierre Adrian, "Hôtel Roma", publié en septembre 2024. La cinéaste choisit d'adapter le roman de cet écrivain "qu'elle adore, qui parle si bien de la jeunesse, de cet âge où tout est possible et où tout est efffrayant". L'histoire se déroule dans l'Italie fasciste de Mussolini à Turin en 1938. Ginia, une jeune fille timide et timorée, travaille dans une maison de la haute couture. Elle vit avec son frère, Severino, étudiant en droit qui, lui aussi, effectue des petits travaux pour survivre. Tous les deux se retrouvent avec des amis à la campagne quand Ginia rencontre une jeune femme qui plonge d'une barque pour les rejoindre sur la plage. Amelia représente aux yeux de Ginia la femme libre, audacieuse, moderne d'une classe sociale différente. Elle est la muse des peintres de Turin et elle introduit sa jeune amie dans le milieu bohème turinois. Dans cette société conformiste, Ginia découvre, grâce à sa nouvelle amie, la liberté : elle rencontre un peintre avec lequel elle entame une relation amoureuse. Sa fascination pour Amélia, qui défie sans cesse les normes, s'amplifie au fil de leurs rencontres amicales. La réalisatrice dépeint avec finesse et délicatesse l'éveil d'une jeune femme à l'amitié amoureuse, sentiment interdit à cette époque corsetée par une morale rigide. En fait, Amalia, malgré son esprit de révolte, ressent un malaise d'être et se sent attirée par la simplicité et par l'innocence candide de Giana. Ce jeu de miroir dans ce duo féminin révèle la difficulté d'aimer et de vivre. Cesare Pavese met en scène dans son oeuvre l'ambiguïté des sentiments et des comportements. Le film semble fidèle au monde pavesien. La scène finale d'un bal où elles osent danser ensemble révèle leur attirance réciproque. Ce film sensible et d'une facture classique sans fioritures raconte une époque trouble en Italie et malgré la tragédie historique du fascisme, les jeunes gens tentaient de vivre et d'aimer, une façon de résister !
mardi 10 décembre 2024
"La librairie sur la colline", Alba Donati
Pour marquer la fin de l'année 2024, j'ai proposé à l'Atelier Littéraire le thème de la lecture dans les romans. J'ai choisi sur les huit titres, "La librairie sur la colline" d'Alba Donati, publié en 2022 aux éditions du Globe. En 2019, Alba Donati, la cinquantaine, poétesse et critique littéraire, veut retrouver son village natal en Toscane. Elle quitte Florence et ouvre une librairie à Lucignana, un tout petit village toscan avec ses 180 habitants. Ce projet fou et irréel se concrétise quand elle installe sa boutique de livres dans sa maison de famille. Sous forme de journal de bord, la narratrice raconte son aventure de libraire : "Le fait est que, pour moi, cet endroit perdu est le centre du monde parce que je le regarde avec les yeux d'une fillette qui a gravi des marches branlantes et vécu dans des maisons glaciales, par des hivers glaciaux ; une fillette qui a réparé les choses cassées avec les moyens dont elle disposait". Cette librairie devient le centre du village, un lieu de vie, un cercle de rencontres. Pourtant, la libraire si sympathique et si motivée affronte des événements indésirables : l'empêchement de l'ouverture avec la Covid, un début d'incendie, l'éloignement de son commerce, loin des villes. Alba décrit son quotidien, ses expériences, ses soucis comme ses bonheurs. Ellle décore sa librairie, intègre un café dans ses murs, aménage un jardin où rêver avec un livre. Le succès arrive et les citadins affluent dans ce village si serein dans la belle campagne toscane. Entraide, solidarité, amitié autour des livres, cette librairie ne vend pas que des ouvrages en papier. Elle propose des confitures d'écrivains, des collants littéraires, des objets divers qui célèbrent la littérature. Pourquoi ouvrir cette librairie dans un coin perdu ? Alba Donati répond : "Parce que j'avais besoin de respirer, parce que j'étais une fillette malheureuse, parce que j'étais une fillette curieuse, (...) parce que j'ai eu des institutrices et des professeurs extraordinaires, parce que je me suis sauvée". A la fin de chaque chapitre, elle énumère les titres de livres commandés par ses clients et j'ai remarqué ses goûts certainement pour certains auteurs comme Colette, Virginia Woolf, Jane Austen sans oublier les écrivains italiens cités de nombreuses fois. Son havre de paix, baptisé "Sopra la Penna", dédié à la littérature, ressemble au jardin anglais de Monk's House, la maison de campagne de Virginia Woolf. Ce récit autobiographique se lit avec un grand plaisir et comme j'ai vécu aussi l'expérience passionnante d'avoir créé ma propre librairie à Bayonne dans les années 70, j'ai retrouvé mes souvenirs en lisant "La librairie sur la colline" et cerise sur le gâteau, la Toscane, une région que j'apprécie tout particulièrement !
lundi 9 décembre 2024
Atelier Littérature, coups de coeur, 2
Odile a présenté "Agrafe" de Maryline Desbiolles, publié en 2024. La jeune Emma, une jeune fille vive et rebelle, adore courir dans les collines. Sa vie bascule quand elle se fait mordre par un chien énorme qui lui lacère la jambe lors d'une rencontre avec un ami. Le péroné ou l'agrafe est abîmé et elle est obligée de suivre de nombreuses séances de rééducation à l'hôpital. Elle sait bien qu'elle ne pourra plus détaler dans la nature. Elle se souvient d'avoir entendu cette phrase quand le chien l'a attaquée : "Mon chien n'aime pas les Arabes". Maryline Desbiolles introduit alors dans son roman les blessures de la guerre d'Algérie, toujours aussi douloureuses. Même boiteuse, elle vivra avec sa cicatrice comme un trophée, ne cessant jamais d'aller de l'avant. Une écrivaine à suivre. Danièle a montré "13 à table", un recueil de nouvelles au profit des Restos du coeur. Quatorze auteurs ont illustré la solidarité qui est le socle de la générosité. Danièle a bien aimé la nouvelle de Sandrine Collette. Un livre acheté à six euros permet d'offrir cinq repas. Une bonne action à la veille de Noël. Geneviève a présenté un écrivain "coup de coeur" en la personne d'Emile Zola qu'elle relit depuis quelques semaines. J'étais contente que notre lectrice amie évoque la saga des Rougon-Macquart, un ensemble de vingt romans, publiés entre 1870 et 1893. Le sous-titre parle de lui-même : "Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire". Inspiré de la Comédie humaine de Balzac, l'écrivain naturaliste voulait étudier "l'influence du milieu et les tares héréditaires d'une famille, originaire de Plassans, sur cinq générations". Il dépeint la société française dans ses grandes transformations qui se produisent : urbanisme parisien, naissance des grands magasins, révolution des déplacements avec les chemins de fer, apparition du syndicalisme. Les romans de Zola semblent plus faciles à lire que ceux de Balzac car plus proches du XXe siècle et de nos avancées sociales. Dans mon prochain atelier de janvier, j'ai glissé un Emile Zola dans ma liste de lectures ! Je dévoilerai le thème de janvier dans la rencontre du jeudi 19 décembre.
vendredi 6 décembre 2024
Atelier Littérature, coups de coeur, 1
Régine a démarré la séquence "coups de coeur" avec le récit, "Le gardien de Téhéran" de Stéphanie Perez, publié chez Pocket en 2024. L'autrice, journaliste à France Télévision, a longtemps travaillé en Iran et elle raconte l'histoire du gardien du musée de Téhéran, un homme seul face à la tyrannie des religieux fanatiques. Il a réussi un pari fou : sauver 300 oeuvres d'art moderne, le trésor de l'impératrice. Ce gardien, Cyrus Farzadi, raconte ses souvenirs et à travers ces confidences, il évoque la splendeur et la décadence de son pays, l'Iran, tombé dans les mains d'obscurantistes islamistes. Un récit basé sur le réel, qui se lit comme un roman. Régine a cité un deuxième coup de coeur avec "Le roitelet", de Jean-François Beauchemin, publié en Folio. Le frère du narrateur souffre de schizophrénie : "Mon frère devenait peu à peu un roitelet, un oiseau fragile dont l'or et la lumière de l'esprit s'échappaient par le haut de la tête". Ce roman sensible et délicat relate avec pudeur une relation unique entre deux frères dont l'un est atteint d'un handicap mental irrémédiable. Mylène a découvert avec un très grand plaisir de lecture le roman de Colm Toibin, "Brooklyn", paru en 2012. Dans les années 50, Ellis Lacey s'expatrie pour travailler dans un commerce à New-York. Elle n'a pas le choix de rester en Irlande et le roman traite de l'exil, d'une nouvelle vie, de liberté, d'espoir et de nostalgie. Elle reviendra chez sa mère et sur sa terre natale pour enterrer sa soeur aînée. Mais, elle a goûté à sa liberté et elle repartira en Amérique. Ce beau et profond roman doit se lire avant la suite de l'histoire, publié en 2024, "Long Island". A lire sans modération. J'étais heureuse du choix de Mylène car Colm Toibin m'avait déjà beaucoup intéressée avec sa biographie romancée sur Thomas Mann, "Le magicien". J'ai évoqué son roman dans mon blog et je me réjouis d'avance de lire "Long Island" cet hiver. Pascale a beaucoup aimé le livre de Sarah Kaminsky, "Adolfo Kaminsky, une vie de faussaire", publié en livre de poche. A 17 ans, le jeune Adolfo devient l'expert en faux papiers de la Résistance à Paris. Pendant trente ans, il exécutera ce travail clandestin au service des rescapés des camps, mais aussi des militants du FNL, des révolutionnaires d'Amérique du Sud, etc. La fille de ce héros politique de l'ombre a écrit un témoignage sur son père, un homme engagé pour la justice.
jeudi 5 décembre 2024
Atelier Littérature, Paul Auster, 3
Avant d'évoquer "Chronique d'hiver", parue en 2012 et lue par Danièle, j'ai relu "L'invention de la solitude", éditée en 1982. Cet ouvrage comprend deux parties : "Portrait d'un homme invisible" et "Le Livre de la mémoire". Paul Auster vient de perdre son père et il écrit un portrait de cet homme invisible, Samuel Auster : "De son vivant déjà, il était absent, et ses proches avaient appris depuis longtemps à accepter cette absence, à y voir une manifestation fondamentale de son être". L'auteur dresse un portrait attachant de ce père si paradoxal et si complexe à ses yeux d'enfant et d'adulte : "Je pensais : mon père est parti. Si je ne fais pas quelque chose, vite, sa vie entière va disparaître avec lui". Il reconstruit la vie de son père à partir des objets qu'il a laissés derrière lui et il s'intéresse au destin de ses grands-parents. Une des clés de compréhension de la personnalité de son père réside dans le passé de son enfance quand sa mère a tué son père qui voulait la quitter pour une femme plus jeune. Cette mère autoritaire et quelque peu déséquilibrée a été acquittée à son procès. Ce lourd passé a certainement traumatisé Samuel Auster. Ce récit autobiographique émouvant se lit plus facilement que le second texte, un essai critique beaucoup plus théorique sur la littérature. Il évoque ses écrivains préférés, des solitaires dans leur chambre comme Hoderlin, Montaigne et même mon écrivain préféré, Pascal Quignard ! Quarante ans après "L'Invention de la solitude", il écrit "Chronique d'hiver" et pose sur sa vie, un regard de sexagénaire dans une méditation sur "la fuite du temps sous l'angle du compagnonnage que tout individu entretient avec son propre corps". Danièle a beaucoup aimé ce récit sincère. L'écrivain se met à distance en se tutoyant et parle de sensations, de jouissance, de souffrance, de l'art de mûrir et de vieillir'. Il revient sur l'histoire de son corps, de ses accidents, de ses maladies. Ce texte autobiographique dépasse évidemment les limites de son corps pour revenir sur sa jeunesse à Paris, sur ses premiers émois amoureux et surtout sur sa femme, Siri Hustvedt. Cet "homme-cicatrice", hanté par le hasard du destin, convoque à nouveau ses parents, son amour du baseball et de l'Europe. Un texte puzzle à lire pour comprendre l'homme Auster qui se confond avec l'écrivain Auster. Les romans de cet écrivain américain ne sont pas toujours faciles à lire mais son univers romanesque montre une imagination fertile et fantaisiste. Ses récits autobiographiques dévoilent un homme attachant, généreux, profond. Un grand écrivain qui aurait évidemment dû recevoir recevoir le Prix Nobel de Littérature !
mardi 3 décembre 2024
Atelier Littéraire, Paul Auster, 2
Régine a bien aimé "Brooklyn Follies", publié en 2005. Nathan Glass, un sexagénaire, décide de revenir à Brooklyn car sa femme l'a quitté. Il est atteint d'un cancer des poumons et il cherche un "endroit calme pour mourir". Il retrouve son neveu, Tom, qu'il n'avait pas vu depuis longtemps. Ces deux hommes déprimés entretiennent une relation solidaire dans leur vision de la vie. Mais, un jour, Lucy, la nièce de Tom apparaît et leur vie va changer. Tout l'univers de Paul Auster se retrouve dans ce beau roman : la ville de New-York, la famille, le deuil, les livres, les problèmes financiers et les difficultés de vivre. Paul Auster a écrit : "Je veux parler de bonheur et de bien-être, de ces instants rares et inattendus où la voix intérieure se tait et où l'on se sent à l'unisson avec le monde". J'ajoute aussi cette citation particulièrement lumineuse que Régine a lue lors de son intervention : "La lecture était ma liberté et mon réconfort, ma consolation, mon stimulant favori : lire pour le pur plaisir de lire, pour ce beau calme qui vous entoure quand vous entendez dans votre tête résonner les mots d'un auteur". Mylène a beaucoup apprécié le dernier roman de l'auteur, "Baumgartner", publié en mars 2024. Ancien professeur de philosophie, Sy Baumgartner, veuf inconsolable de soixante-dix ans, se souvient de son passé et ses pensées surgissent en lui comme des vaguelettes lointaines dans le "passé distant que l'on distingue à peine, vacillant à l'extrémité la plus lointaine de la mémoire, et par fragments lilliputiens, tout lui revient". Il plonge alors dans les souvenirs de sa jeunesse à Newark, de sa rencontre avec Anna, une poétesse en herbe et à leur quarante ans de bonheur conjugal jusqu'à sa disparition. Son présent diminué, amputé de la présence de sa chère épouse, se déroule dans une solitude ardue, rompue par une étudiante qui se passionne pour la poésie d'Anna. Un roman sensible, profond, attachant sur l'amour et sur la perte. A lire absolument, résolument. Un dernier cadeau romanesque de Paul Auster. A lire sans tarder. A mon avis, un des meilleurs livres de Paul Auster, un livre-mémoire, un livre-confidence, son testament littéraire. Odile, la première pour l'ancienneté de sa présence à l'Atelier, n'est pas rentrée facilement dans l'oeuvre austérienne. Elle s'est efforcée de lire "Excursions dans la zone intérieure" où l'écrivain américain revisite son enfance, peuplé d'objets divers, de héros de romans, de cinéma. Les rêveries et les fantasmes de ce jeune garçon n'ont pas convaincu notre amie lectrice. (La suite demain)
lundi 2 décembre 2024
Atelier Littérature, Paul Auster, 1
Nous nous sommes réunies le jeudi 21 novembre autour de Paul Auster en première partie de l'Atelier et nous avons ensuite évoqué quelques coups de coeur. Odile, une amie lectrice assidue, a montré sa passion pour Paul Auster car elle a lu pratiquement toutes ses oeuvres. Elle a même choisi un titre que je n'avais pas mis sur la liste tellement ce roman de plus de mille pages me semblait impossible à lire en un mois. Il s'agit de "4 3 2 1", publié chez Actes Sud en 2018. Dans ce texte dense et passionnant, l'auteur raconte quatre versions différentes de la vie du même protagoniste. Archie Ferguson, le héros du livre, grandit avec les mêmes parents juifs de la classe moyenne dans les quatre versions et il conserve les mêmes amis et la même amoureuse, Amy Schneiderman. Les quatre destins prennent des chemins divergents et les relations entre les personnages diffèrent d'une version à l'autre. L'arrière-plan du roman évoque les événements historiques dans les années 50 et 60 : la guerre du Vietnam, les luttes pour les droits civiques, la saga Kennedy, les émeutes de Newark. Ce roman "gigogne", "sophistiqué dans la forme", rappele les obsessions de l'écrivain américain : "bifurcations du destin, jeux vertigineux de l'identité et du hasard". Bravo à Odile d'avoir lu ces 1096 pages ! Pour découvrir cette magnifique création littéraire, il faut donc se donner du temps à soi... Ce n'est pas toujours facile quand d'autres écrivains nous attendent avec impatience... Pascale a lu "Mr Vertigo", publié en 1994. Même si elle n'apprécie pas la fantaisie dans les romans, elle a bien apprécié Walt, le personnage principal, un jeune orphelin élevé par un oncle méchant. A 9 ans, il est recueilli par un maître, Maître Yéhudi, qui lui promet de lui apprendre à voler. Il va rencontrer Madame Sioux, une femme indienne et Esope, fils d'une esclave morte en couches. Il va se passer beaucoup d'événements pour le jeune Walt. Va-t-il réussir à voler ? Il faut lire ce roman baroque et loufoque pour le savoir. Geneviève a lu "La nuit de l'oracle", publié en 2004. Très difficile à résumer, elle a trouvé ce roman un peu complexe dans sa construction mais malgré cette difficulté de lecture, elle l'a trouvé intéressant. Les personnages "créent une mise en abîme : l'auteur prend un écrivain pour personnage principal, qui lui-même prend un éditeur comme pilier du livre qu'il va écrire". Paul Auster interroge le mystère de la création littéraire. (La suite, demain)