jeudi 12 juin 2025

"Journal : Les années d'exil, 1949-1967", Sandor Marai, 1

 J'avais découvert le Journal de Sandor Marai, le premier tome, "Les années hongroises, 1943-1949", paru en Livre de Poche en 2021. Témoin d'une époque historique couvrant les années de la Guerre et de l'arrivée des Soviétiques à Budapest, l'écrivain racontait aussi sa vie quotidienne, ses lectures, son oeuvre littéraire, ses relations familiales. Un critique a écrit que ce journal lui permettait de confirmer que "sa seule façon d'être au monde était l'écriture". Le deuxième tome concerne les années 1949-1967 quand il a quitté Budapest après l'arrivée de l'Armée rouge. Il s'installe près de Naples, première et lumineuse étape de son exil. Ecrivain polyglotte, il parle français, allemand et apprend l'anglais. Dans ce journal patchwork, il évoque son quotidien à Naples mais aussi la matrice de ses romans, ses nombreuses lectures, les anecdotes familiales, son passé en Hongrie, ses escapades en Allemagne, en Suisse et en France. La marche du monde le passionne et il cite souvent des événements politiques de cet époque. Il se retrouve dans une situation financière précaire qui le tourmente dans son texte. Ses commentaires sur Naples sont particulièrement savoureux. En tant qu'amoureuse de l'histoire littéraire, j'apprécie ses diverses critiques sur les écrivains de prédilection : Gide, Valéry, Proust, Colette, etc. Il cite même Carson Mac Cullers, une écrivaine américaine peu connue. Son flair littéraire, son immense culture écléctique, sa curiosité insatiable forcent l'admiration tout autant que sa prose limpide et efficace. Ses réflexions sur la mer rejoignent son sentiment d'une patrie perdue : "La véritable patrie est là, dans la mer, dans le monde. L'autre est un bon souvenir dont on ne peut, ni ne doit se libérer. De patrie, il n'y a qu'une seule : l'infini". Il vit à Naples de 1948 à 1952 et il a adoré cette période, une parenthèse enchantée dans son parcours d'exilé. Il écrit dans son journal le 9 juillet 1950 : "J'ai décidé d'émigrer en Amérique". Il rend un hommage vibrant à l'Italie car son départ approche : "En Italie, j'aime tout. Il y a plus d'équilibre, plus d'humanité ici. C'est un foyer, un jardin féerique, un eden..." 

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