Je n'avais jamais lu ce classique de la littérature anglaise, "1984", de George Orwell. J'avais l'impression de connaître ce texte tellement il sert de référence pour tous les lecteurs et lectrices qui aiment le genre dystopique. Comme le monde vacille en ce moment sur ses bases traditionnelles, ce roman, publié en 1949, conserve une actualité bien plus qu'inquiétante. L'écrivain anglais achève ce livre à la veille de sa disparition, le neuvième de son oeuvre. Le thème majeur décrit les conséquences du totalitarisme, de la surveillance de masse, de l'anéantissement de l'individu. Lui-même, socialiste démocrate, antifranquiste, appartenait à la gauche antistalinienne. L'histoire se déroule dans un futur imaginaire à Londres. Le monde entier est en guerre perpétuelle entre trois blocs géopolitiques tous totalitaires : l'Oceania (l'Occident d'aujourd'hui), l'Eurasia (la Russie) et l'Estasia (la Chine et plus). La Grande Bretagne, province d'Oceania, s'est transformée en dictature, dirigée par Big Brother, un leader soutenu par la police de la Pensée. Dès les premières pages du roman, une cascade d'horreurs surgit pour présenter le modèle du totalitarisme : un télécran permanent sur les individus, aucune intimité, le négationnisme historique, la propagande permanente pour vanter la gloire du leader, la liberté d'expression interdite, la torture et la déportation des rebelles, la sexualité contrôlée, la vérité niée, etc. Le slogan du Parti, lapidaire et cynique, s'affiche partout : "La guerre, c'est la paix. La liberté, c'est l'esclavage. L'ignorance, c'est la force". Le personnage central, Winston Smith, travaille au sein du Ministère de la Vérité ! Il doute, se méfie, n'adhère pas complétement à l'idéologie totalitaire et rêve du passé avant la dictature. Il trouve un cahier dans une papeterie et cet objet si banal en soi déclenche en lui l'envie de raconter le cauchemar d'Oceania. Son journal intime l'aide à traverser cette vie insupportable. Winston Smith occupe un poste stratégique : falsifier le passé et inventer les mensonges du Parti. Ce monde totalitaire possède son propre langage, la novlangue, en se dotant d'un nouveau dictionnaire : "Vous croyez que notre travail principal est d'inventer des mots nouveaux ? Pas du tout ! Nous détruisons chaque jour des mots, des vingtaines de mots, des centaines de mots. Nous taillons le langage jusqu'à l'os". Mort de la pensée, mort du libre arbitre, mort de la civilisation. Comment résister dans ce monde mortifère ? Le camp du Bien ? Winston Smith garde dans sa mémoire le sentiment des temps anciens, "Des temps où existaient encore l'intimité, l'amour et l'amitié (...) Aujourd'hui, il y avait de la peur, de la haine, de la souffrance, mais il n'y avait aucune dignité dans l'émotion. Il n'y avait aucune profondeur, aucune complexité dans les tristesses". (La suite, demain)
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